Le travail, un droit ou une notion à redéfinir ?

Cahier de l’entrée Travailler / Entreprendre

Argumentaire

Le travail, un droit constitutionnel bafoué au profit de la notion de « marché du travail ».

Dès le préambule de la Constitution française nous pouvons lire les mots suivants : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi…. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». Quant à la déclaration des droits de l’homme l’Article 23
 indique que « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage. Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal. Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant ainsi qu’à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et complétée, s’il y a lieu, par tous autres moyens de protection sociale. »

Pendant les « trente glorieuses », les notions de travail et d’emploi étaient considérées dans un contexte économique et social qui ne prévoyait pas la fin du plein emploi. L’équilibre était assuré entre le nombre de citoyens aptes au travail et les besoins de main d’œuvre. Les crises successives des années 70 à nos jours ont révélé l’incapacité de notre pays à proposer des emplois pérennes à ses citoyens et en particulier à ceux qui sont le moins bien armés sur le marché du travail. Car le travail est devenu un marché comme un autre, régulé par l’offre et la demande, et qui peut être délocalisé dans la recherche de profits toujours plus surs et au service des actionnaires. Aujourd’hui, l’exclusion du marché du travail touche plus de 5 millions de personnes dans un pays qui s’est considérablement enrichi depuis 50 ans et qui reste un des cinq plus riches pays du monde.

Alors que nous vivons une époque où le chômage est structurel, les textes qui nous régissent ont conservé cette référence au travail et à l’emploi alors même que « le droit d’obtenir un emploi » ne peut plus être garanti par l’Etat. Nombreux sont ceux qui, ces trente dernière années, se sont indignés de cette situation qui cherche à résoudre la question du chômage en continuant à la considérer du côté des individus et non de l’organisation de la société elle-même. Certains arrivent même à mettre le doute sur la capacité des individus « inemployés », et se défaussent ainsi de leur responsabilité en rappelant aux chômeurs « le devoir de travailler » inscrit dans la constitution.

Dans ce contexte de précarité où nul n’est à l’abri d’un déclassement professionnel et social, il est urgent de venir en aide aux personnes dans la plus grande difficulté. Il faut faire pression pour un changement du modèle de société. En effet, la précarité, les discriminations, le souci du profit à court terme, l’importance de l’échec scolaire (en France, 120000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification) n’offrent pas à chacun la possibilité de trouver un travail.

C’est dans le cadre de ces réflexions que se sont progressivement créées les Structures d’Insertion par l’Activité Economique (S.I.A.E.) au service de ceux qui en ont le plus besoin.

Elles font la preuve que des individus en activité, à qui l’on donne les moyens d’assurer économiquement leur existence et donc leur dignité, prennent leur place d’acteurs dans la société et participent activement à notre richesse commune qu’elle soit économique, sociale, culturelle, citoyenne … En un mot : humaine.

Comment sensibiliser d’autres acteurs

La sensibilisation des autres acteurs se fera en :

  • informant les entreprises dites classiques des principes propres à l’IAE ;

  • diversifiant les politiques et modalités de recrutement et de gestion du personnel ;

  • rapprochant les entreprises des SIAE via des partenariats et des conventions ;

  • en mettant en place des clauses d’insertion.

Conditions du développement

La prise de conscience individuelle et collective que nous sommes tous concernés par le fait que chacun devrait avoir sa place dans notre société.

Données chiffrées

En 2009, 462 Structures de l’Insertion par l’Activité Economique (SIAE) étaient présentes sur le territoire francilien. On dénombrait 84 Associations Intermédiaires (AI), 147 Entreprises d’Insertion (EI), 15 Entreprises de Travail Temporaire d’Insertion (ETTI) et 216 Ateliers et Chantiers d’Insertion (ACI).

Alors que les ACI représentent 47% du nombre total de SIAE en IDF, ils concentrent 21% des ETP de salariés en insertion de la région. Les AI, qui représentent quant à elles 18% des SIAE, génèrent 43% des ETP d’insertion.

Changement d’échelle possible

Pour ce secteur qui est réglementé depuis 1987 et qui puise ses racines dans les mouvements sociaux des années soixante, le changement d’échelle a déjà eu lieu. La capacité de nos réseaux a se développer, à s’adapter aux contextes économiques et à la variabilité des soutiens des pouvoirs publics démontre que ce modèle économique et social est souple, performant et porteur d’innovation.

Facteurs de succès

  • La capacité d’associer différent acteurs du monde économique et social, qu’ils soient associatifs, institutionnels ou du secteur privé,

  • Un mode de gouvernance participatif lié au statut associatif tout en maitrisant les responsabilités d’employeurs et la gestion financière de projets ambitieux,

  • une culture de l’expérimentation, une volonté d’innovation économique et sociale,

  • une écoute des besoins du territoire et la capacité à se développer vers de nouveaux secteurs d’activités

  • la conscience de servir un projet qui ait du sens.

Impacts de l’initiative

En Ile-de-France, l’IAE a salarié plus de 27500 personnes en insertion ce qui a représenté plus de 5800 ETP durant l’année 2009. Ainsi, pour 1000 demandeurs d’emploi franciliens inscrits au Pole Emploi, il y a eu 68 personnes en SIAE. Cette activité d’insertion génère également des emplois liés à l’accompagnement et à l’encadrement des personnes fragilisées. Elle représente plus de 2800 emplois salariés et mobilise presque 1300 bénévoles. Dans l’ensemble des SIAE, on compte en moyenne trois salariés en insertion pour un salarié permanent dans l’année. Ces emplois sont non délocalisables et répondent aux besoins spécifiques d’un territoire. Cet impact quantitatif est largement complété par les impacts qualitatifs . L’activité des SIAE crée du lien social, offre un statut de salarié à la personne, et la remobilise sur un projet personnel.

L’organisation

Le secteur de l’Insertion par l’Activité Economique (IAE) a évolué avec notre société et l’apparition de ce chômage structurel. Ce secteur associatif a perçu dès son origine qu’être actif, être en activité est primordial. C’est ce qui crée le lien avec la société dans laquelle on vit, c’est ce qui donne le sentiment d’appartenance. Les SAIE portent encore aujourd’hui ce message.

L’IAE fait face aux conséquences du chômage de masse. Les expériences d’insertion par le travail sont un moyen efficace de lutter contre l’exclusion sociale et professionnelle.

Dès l’origine, l’I.A.E. a été conçue en France comme un outil souple, intégrant des soutiens de natures diverses, qui vont de l’aide à la résolution de difficultés très concrètes faisant obstacle à l’insertion (problèmes de logement, de santé, d’isolement…), à l’aide à l’acquisition de qualification par l’apprentissage en situation de travail ou par la formation professionnelle. La loi de 1998 relative à la lutte contre les exclusions a consacré le rôle de l’IAE. Dans ce texte, les missions de ce secteur sont clairement définies, pour les différents dispositifs qui le composent : AI, EI, ETTI, ainsi que les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) créés par cette même loi

Les fondements réglementaires définissent l’I.A.E. selon quatre critères : l’objet de la structure est spécifiquement lié à l’insertion sociale et professionnelle ; le public est identifié comme rencontrant des difficultés particulières, professionnelles (chômage de longue durée, faible qualification…) et sociales (logement, santé, mobilité, environnement familial…); l’exercice d’une activité rémunérée dans le cadre d’un contrat de travail de droit commun et sur une période volontairement limitée (notion de sas vers l’emploi) ; la mise en œuvre de modalités spécifiques d’accompagnement socioprofessionnel (article 11 de la Loi du 29 juillet 1998 et L 5132-1 du Code du travail). Les SIAE. conjuguent obligatoirement équilibre économique et plus value sociale.

La structure, porteuse de l’initiative

Les Associations Intermédiaires (AI), se positionnent comme un intermédiaire entre des demandeurs d’emploi et des particuliers ou des professionnels (entreprises, collectivités locales, associations, etc.) ayant besoin d’un service : elles embauchent les premiers et les mettent à disposition des seconds pour réaliser des missions de travail.

Cette activité de mise à disposition s’inscrit dans le cadre d’une réglementation précise, dont les points les plus importants portent sur le territoire d’intervention et la durée de la mise à disposition. Le territoire d’agrément est attribué par la préfecture de chaque département et étudié lors d’un comité départemental de l’insertion économique, le CDIAE piloté conjointement par le préfet et le président du conseil général.

D’après les statistiques de la Direction de l’Animation et de la Recherche des Etudes et des Statistiques (DARES), on dénombrait en France à la fin de l’année 2008 782 associations intermédiaires (AI), ayant fait travailler plus de 3 000 salariés permanents (en équivalent temps plein) et surtout 129467 salariés en insertion, mis à disposition chez des utilisateurs.

L’Ile-de-France, à elle seule, regroupe 86 AI, réparties comme suit : 19 à Paris ; 14 dans les Hauts-de-Seine ; 12 dans le Val d’Oise ; 7 dans le Val-de-Marne ; 10 dans les Yvelines ; 8 dans l’Essonne ; 7 en Seine-et-Marne ; 7 en Seine-Saint-Denis.

Les Ateliers et Chantiers d’Insertion (ACI) sont un dispositif d’insertion qui a « pour objet l’embauche de personnes afin de faciliter leur insertion sociale et professionnelle, en développant des activités ayant principalement un caractère d’utilité sociale, et qui a conclu avec l’Etat une convention … ».

« …Les ateliers et chantiers d’insertion assurent l’accueil, l’embauche et la mise au travail sur des actions collectives de personnes mentionnées au I de l’article L. 322-4-16 et organisent le suivi, l’accompagnement, l’encadrement technique et la formation de leurs salariés en vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d’une insertion professionnelle durable… ».

Le chantier-école offre une démarche pédagogique spécifique qui, à partir d’un support de production grandeur nature, utile à la collectivité, a pour objectif la progression des personnes connaissant des difficultés socioprofessionnelles les conduisant à des difficultés d’accès à l’emploi durable. Il accompagne de manière spécifique, des personnes en difficulté sous contrat aidé dans un cadre collectif, quelle que soit la nature de l’activité, de production de biens ou de services ; le support de production constitue le support de l’insertion, de la formation, mais aussi de l’accompagnement social.

Le modèle financier

Les Ai et ACI reposent sur un modèle économique associatif et à but non lucratif qui ne rétribue pas des actionnaires ou des associés. Les structures peuvent faire des bénéfices qui doivent alors être réinvestis dans le développement de la structure. Ce modèle ne repose pas sur le profit, il doit néanmoins assurer son équilibre économique. avec le concours de subventions publiques et/ou de contrats aidés, en particulier dans le cas des ACI.

Les acteurs (Qui ?)

Les Structures d’Insertion par l’Activité Economique (S.I.A.E.) proposent une étape pour un retour vers l’emploi en utilisant un support de production (activité productive dans un cadre économique et de travail) comme un outil de formation et de réinsertion sociale et professionnelle.

Plusieurs dispositifs existent et illustrent comment l’insertion des personnes exclues du marché du travail peuvent avoir leur place dans la société. En voici deux exemples :

Les Associations Intermédiaires (AI), se positionnent comme un intermédiaire entre des demandeurs d’emploi et des particuliers ou des professionnels (entreprises, collectivités locales, associations, etc.) ayant besoin d’un service : elles embauchent les premiers et les mettent à disposition des seconds, pour réaliser des missions de travail.

Le chantier-école accompagne de manière spécifique des personnes en difficulté sous contrat aidé dans un cadre collectif, quelle que soit la nature de l’activité de production de biens ou de services ; le support de production constitue le support de l’insertion, de la formation, mais aussi de l’accompagnement social.

Ces structures peuvent adhérer à des réseaux dont Chantier Ecole IDF et l’Ardie IDF.

Les jeunes

L’IAE répond aux problématiques liés à l’emploi des jeunes même si ce n’est pas leur axe principal. Sur l’ensemble des SIAE les jeunes représentent 19% des publics accompagnés dont 27% dans les ACI. Le projet associatif s’est développé dans l’esprit d’accueillir chaque personne le sollicitant. C’est une des raisons qui expliquent la diversité des publics accueillis et la capacité d’adaptation des SIAE qui en font de véritable laboratoires d’innovation sociale fortement implantés sur les spécificités de leurs territoires.

Les partenaires

  • les pouvoirs publics

  • les acteurs économiques : entreprises, groupements d’employeurs…

  • les acteurs territoriaux et collectivités locales…

  • les particuliers

  • les acteurs sociaux

Proposition pour influencer les décideurs

Le travail est accompli en proximité, avec des réponses souples et personnalisables, adaptables aux individus. L’IAE est un partenaire des ressources humaines et un acteur du changement.

Propositions pour convaincre l’opinion

Les SIAE peuvent être un modèle capable de remettre l’humain au centre d’un dispositif économiquement viable et reposant sur l’exigence de solidarité et nous offrent un modèle prenant mieux en compte notre dimension humaine.

Présentation de l’initiative (Quoi ?)

L’insertion par l’activité économique (IAE) s’est construite pour faire la preuve que « nul n’est inemployable ». Cette preuve, les structures de l’IAE l’ont faite à travers l’ accompagnement vers l’emploi et l’aide à la résolution de difficultés très concrètes parmi lesquels l’accès au logement, à la santé, à la formation.

Quelles alliances positives ?

  • Un travail en concertation avec ceux qui font la politique de l’emploi et du développement des activités économiques,

  • Un lien plus direct avec la recherche dans le domaines des sciences humaines

  • l’articulation des actions avec les centres de ressources régionaux.

Ressources, financements et moyens utilisés

  • Les donneurs d’ordre par la nature du contrat qui les lient aux structures et le paiement des missions qu’ils ordonnent.

  • Les pouvoirs publics (Etat, Conseil Régional, Conseils Généraux, collectivités locales) à travers des dispositifs de soutien à l’IAE et des aides aux publics fragilisés.

Synthèse de mon indignation en une seule phrase

Notre modèle de société ne permet pas à chacun de trouver un travail dans lequel il peut apporter une richesse économique au pays, et avoir un niveau de vie décent répondant aux besoins primaires alors que notre société au nom de sa constitution et de la déclaration des droits de l’homme s’y engage.