Cahier de l’entrée Se loger / Habiter
La précarité énergétique se définit à la lumière de 3 facteurs : la situation économique et financière des ménages, la mauvaise qualité thermique des logements et le coût de l’énergie, qui comprend l’explosion inéluctable des prix de l’énergie. Aujourd’hui, on compte 3,5 millions de ménages français en précarité énergétique avec un taux d’effort énergétique supérieur à 10% sans compter les ménages qui sont dans des stratégies de privation. Chaque année, on recense 300 000 demandes pour les fonds d’impayés d’énergie et il en coûte plus de 10 millions d’euros aux collectivités sans jamais s’interroger sur la qualité thermique des logements…
Il y a une réelle inégalité sociale face à l’énergie, les ménages les plus pauvres consacrent 15% de leurs revenus pour leurs dépenses énergétiques contre 6% pour les plus riches. Les ménages modestes vivent dans des logements dégradés, mal isolés et surconsommateurs, disposent d’équipements de mauvaise qualité, sont éloignés des centres urbains et dépendants de la voiture, en outre du fait du chômage, ils passent davantage de temps à l’intérieur de leur logement ce qui engendre des consommations d’énergie plus importantes…
Outre les conséquences financières, la précarité énergétique a des conséquences sanitaires et sociales : maladies respiratoires, asthme, dépression, repli sur soi, surmortalité hivernale…
La Région PACA est marquée par un tissu associatif très dense (80 000 associations soit 10 % du nombre d’associations en France) qui apporte une grande richesse en terme d’innovation : certains projets de lutte contre la précarité énergétique ont été précurseurs en France. Les partenaires institutionnels mènent des démarches innovantes qui viennent appuyer ces dynamiques locales. L’existence d’un Réseau Régional sur la Précarité Energétique est une spécificité (seuls 4 réseaux régionaux sont actifs en France). Pourtant la plupart des expériences positives n’ont pas été pérennisé faute de moyens et de portage politique fort, il n’existe pas encore de fonds social d’aide aux travaux, alors que ce dispositif est largement plébiscité au niveau national et a fait ses preuves dans les territoires qui en disposent (une vingtaine en France). Ces constats confirment la nécessité d’engager un travail de fond sur la pérennisation des actions exemplaires afin de passer de l’expérimentation à la généralisation.
Les fonds sociaux d’aide aux travaux : une vingtaine de département ont mis en place ce type de dispositif qui vise à diagnostiquer les situations de PE et mettre en place un accompagnement qui peut aller d’une simple aide financière à l’achat de petits équipements et matériaux jusqu’au montage d’un dossier pour la réalisation de gros travaux. L’intérêt de ce dispositif est de répondre de manière adaptée aux situations spécifiques des familles via la mise en place de solutions de divers niveaux, y compris pour les situations n’entrant dans aucun cadre de « droit ». Il offre aussi pour les travailleurs sociaux, souvent démunis face à ces situations, un appui technique et un éventuel recourt de médiation. La dimension partenariale thermicien/travailleur social permet d’apporter une réponse globale pertinente tant technique que sociale pour les familles. La réalisation de travaux par des artisans locaux est créatrice d’emplois…ça c’est de l’économie sociale et solidaire !
En PACA, comme en France, plusieurs actions sont menées pour lutter contre la précarité énergétique :
1. Améliorer la connaissance locale des phénomènes de précarité énergétique : création du Réseau RREP en 2007 ; multiplication des évènements sur le sujet organisés par des institutions (CR PACA, DREAL…) et têtes de réseaux associatifs (FNARS1, LHI2, RREP…) ; réalisation d’études pour caractériser le phénomène (Etude sur la vulnérabilité énergétique des ménages et des territoires dans le 05, DDT05/CETE Méditerranée ; la précarité énergétique dans le Var, CG83/Habitat & Société…).
2. Informer les publics : les réunions d’information et les animations en direction des ménages proposées tant par les professionnels de l’énergie (Réseau des EIE3, EDF…) que de l’action sociale et du logement (ESF Services, Médiance 13, AICS4, Compagnons Bâtisseurs de Provence…) ; les appartements témoins sur la maîtrise des consommations d’eau et d’énergie, fixes (Ecopolenergie/Logirem, CLCV du Pays d’Arles) ou itinérants (Ecopolenergie/CAF 13), déployés à proximité des publics en précarité, ont le vent en poupe car ils favorisent aussi les dynamiques partenariales à l’échelle d’un quartier ; de nombreux outils de sensibilisation type plaquettes, films, guides pratiques sont diffusés dans les territoires et adaptés aux spécificités des ménages ; enfin plusieurs structures de PACA (Geres/Compagnons Bâtisseurs, EDF/SOS Familles EMMAÜS…) sensibilisent des relais locaux (bailleurs sociaux, travailleurs sociaux…) sur le sujet afin qu’ils puissent informer les familles, les orienter vers les dispositifs existants, les structures de conseils.
3. Former les professionnels sur la précarité énergétique : la formation des professionnels est un enjeu majeur pour le développement d’actions de lutte contre la précarité énergétique, la diffusion d’une culture commune et le travail partenarial entre acteurs souvent cloisonnés dans leurs champs de compétences. Depuis 2000, l’ADEME mène une politique volontariste de formation des professionnels sur la précarité énergétique (travailleurs sociaux et cadres, conseillers espace info énergie, création d’un réseau de formateurs). En PACA, plusieurs structures (majoritairement dans le domaine de l’énergie) proposent des formations en direction des travailleurs sociaux des CAF5, Conseils Généraux et CCAS6, des actions de formation des agents des bailleurs sociaux (personnel de la Logirem notamment) ont également été expérimentées, mais ces formations restent ponctuelles et gagnent à être structurées.
4. Diminuer les consommations d’énergie des logements… :
Bien que pertinentes, les actions détaillées ci-dessus ne trouvent leur sens que s’ils elles sont assorties d’actions concrètes visant à diminuer les consommations d’énergie dans le logement.
…en améliorant l’efficacité énergétique des équipements : via la distribution de lampes basse consommation, pose de kits économes en eau et en énergie (EDF, Médiance 13, Ceder, AERE, Pact 04, Azzura Lights, Ecopolenergie, PSP Actes…), revente de réfrigérateurs récupérés et testés sur leur performance énergétique (La Petite Ourse/EDF) jusqu’à la mise en place d’un fonds de remplacement des appareils électroménagers pour les familles modestes (Compagnons Bâtisseurs), les expériences ne manquent pas en Paca mais elles sont rarement généralisées.
…en améliorant l’état thermique des logements : les dispositifs et opérations d’amélioration de l’habitat (OPAH7, PIG8…) ont évolué ces dernières années vers une meilleure prise en compte de l’état thermique des logements voir un volet lutte contre la précarité énergétique (exemples sur la communauté de communes du champsaur, à Toulon, la Seyne-sur-Mer, Brignoles…), les chantiers d’autoréhabilitation intègrent cette thématique et les conseils généraux s’organisent pour élaborer des fonds sociaux d’aide aux travaux (CG 05 et 83) mais aucun n’existe encore à ce jour.
…en produisant des logements performants : 130 familles de PACA sont concernés par l’opération 2000 toits pour 2000 familles de la fondation Abbé Pierre visant la production de logements performants économes en charges, les bailleurs sociaux du territoire fédérés au sein de l’ARHLM se préoccupent de plus en plus des performances énergétiques de leurs parcs de logements et de l’accompagnement des locataires (exemples de la Logirem, Famille et Provence, Var Habitat…).
5. Agir globalement dans les territoires : en PACA, différentes démarches permettent d’intégrer les actions de lutte contre la précarité énergétique au cœur des politiques territoriales.
A travers l’appel à projet « collectivités lauréates AGIR pour l’énergie » Etat-Ademe-Région : 75 communes de Paca se sont engagées dans une charte d’objectifs déclinée en plan d’actions pour une utilisation rationnelle de leurs ressources en énergie et en eau. Un thème est consacré à « lutter contre la précarité énergétique et développer la solidarité » via notamment la formation des travailleurs sociaux et la diffusion par les CCAS de kits « économies d’énergie » et de brochures de conseil.
A travers les PDALPD9 des Conseils Généraux : En 2010, la loi Grenelle 2 impose aux conseils généraux d’intégrer dans leur PDALPD un volet lutte contre la précarité énergétique. En Paca, 3 CG ont élaboré des fiches actions spécifiques (CG83, 05 et 84).
A travers des PCET10, Agendas 21, AEU11, SCOT : Ces démarches lorsqu’elles ciblent les ménages en situation de précarité énergétique peuvent être des leviers d’actions favorables. Les PCET nous semblent particulièrement pertinents sur cette thématique. Un appel à projet Ademe-Région-DREAL-FEDER lancé en janvier 2011 vise à encourager et accompagner les démarches de PCET portées par les collectivités.
Devant l’augmentation inéluctable des coûts de l’énergie il y a urgence à agir pour que les plus pauvres (et demain les classes moyennes) soient logés dans un habitat de qualité, économe en énergie.