Cahier de l’entrée Participer / Démocratiser
Depuis une trentaine d’années, les déséquilibres se sont accrus au sein de la société, provoquant davantage d’exclusions, de repli sur soi et de perte de confiance. En même temps, la notion d’utilité sociale, mal définie d’une manière globale au niveau national, peut difficilement être mobilisée par les collectivités locales, pour apporter des réponses à ces
Devons-nous laisser gagner le fatalisme de ceux qui croient de moins en moins à la capacité du choix et de l’action collectifs (politique, syndical, voire associatif, autrement que comme outil de soulagement des déséquilibres les plus criants ?)
Aujourd’hui, la transposition en droit français de la Directive Services complique l’utilisation d’une large palette d’outils et de dispositifs dans la manière de construire des partenariats avec les acteurs de l’ESS.
Le marché et la concurrence sont-ils les seules formes possibles de fonctionnement économique?
Le bien commun, l’intérêt collectif, le « tous bien vivre ensemble », sont-ils des idées superflues… ?
Veut-on aller vers une société du tout marché, où la mise en concurrence généralisée serait la règle?
Pourtant, depuis des années, des acteurs et des collectivités expérimentent des définitions et des mises en œuvre de la notion d’utilité sociale et sociétale dans leurs actions. Cette utilisation de l’utilité sociale relance du débat sociétal, sur les valeurs partagées,…
L’utilité sociale peut-elle être un outil de pilotage des politiques publiques, et permettre de construire l’indispensable transformation de l’économie?
Pour valoriser auprès du plus grand nombre la notion d’utilité sociale et sociétale comme indicateur de différenciation dans les politiques publiques, il y a un retour d’expériences à faire pour éviter que la fragmentation des pratiques aboutisse au désintérêt du concept.
La reconnaissance et la définition pratique d’un « socle » de la notion d’utilité sociale et sociétale est un pont vers la reconnaissance d’une économie plurielle, et poser de nouvelles manières de construire les politiques publiques.
Pour aller plus loin, il est nécessaire que les milieux de la recherche fondamentale et expérimentale aient les moyens d’approfondir les connaissances actuelles.
Il est aussi nécessaire que cette notion d’utilité sociétale soit incluse dans les programmes scolaires, depuis les premières classes, jusque dans les grandes écoles qui forment les futurs dirigeants.
La preuve de la pertinence de cette approche de l’utilité sociétale doit nourrir le débat et l’action citoyenne pour remettre en cause l’interprétation française, à la fois trop stricte et trop floue, de la Directive Cadre Européenne « Services », permettant à la fois d’élargir et de préciser les champs et les formes d’activités exclues de la Directive, au service des acteurs de l’ESS et des collectivités, mais surtout de l’emploi et des dynamiques des territoires.
Par la suite, il serait nécessaire que les négociations européennes soient à nouveau ouvertes pour assouplir la Directive elle-même, avec une prise en compte de cette dimension d’utilité sociale.
1- MOBILISER LARGEMENT
La construction d’une démarche d’évaluation de l’utilité sociale et surtout sa mise en œuvre ne peut se faire qui si les différentes parties prenantes sont réellement impliquées depuis le début du processus. A minima, les élus, les techniciens des collectivités concernés, les acteurs et réseaux qui vont être concernés. Oublier l’un d’entre eux, ou vouloir le « raccrocher » en cours de route empêche l’adhésion au projet.
Au-delà de ces acteurs incontournables, il est souhaitable que la mobilisation dépasse les seuls acteurs de l’ESS, et associer à la concertation d’autres services des collectivités et d’autres secteurs économiques et sociaux (syndicats). Cela peut contribuer à
mieux faire comprendre les spécificités de l’ESS, et de l’utilité sociale
rendre visible des bonnes pratiques, transposable ailleurs
entendre leurs points de vue, qui peuvent être divergeants, dans le cadre de « Tables de controverses »
faciliter leur appropriation (même s’ils ne partagent pas tout) avec les entreprises dans leurs actions de mécénat, les banques, pour apprendre à regarder autrement les projets d’utilité sociale
Le regard extérieur de chercheurs universitaires et d’organisations d’observation-conseil d’ESS permet un regard extérieur, et facilite la construction d’un modèle adaptable aux besoins et aux moyens.
Ce travail partagé inclut la partie évaluation, conçues par un regard croisé de ces différentes parties prenantes, et de « Comités des pairs » d’acteurs engagés sur des actions similaires.
2- UTILISER DES INDICATEURS COMMUNS LISIBLES
La réussite d’une évaluation de pratiques d’utilité sociale passe par la définition d’indicateurs communs, qui doivent être lisibles de tous, et réellement utilisables. Mieux vaut quelques critères globaux, ou imparfaits, qu’acteurs et services vont pouvoir réellement utiliser, que trop d’indicateurs, qui ne seront oubliés.
Pour faciliter l’appropriation des démarches d’utilité sociale, il serait nécessaire que des critères « socles », comme ceux mobilisés par les quelques collectivités engagées ici, soient définis au niveau national, par un travail partagé de l’Etat, de représentants des collectivités et des acteurs. Des critères autour de :
la responsabilité des acteurs,
la prise en compte des solidarités
la valorisation de biens communs à protéger et valoriser
la créativité, l’innovation sociale, économique, managériale
l’ancrage et le rapport au territorial
la viabilité économique, créatrice d’emplois de qualité, qui propose un autre rapport à la consommation
la gouvernance interne et externe (réseau…), incluant l’accès à la formation et l’information pour décider, et la construction de processus d’évaluation
la prise en compte des coûts sociaux et environnementaux évités,
la prise en compte des richesses culturelles
doivent pouvoir être partagés.
Ce socle permettrait ensuite de définir des indicateurs plus précis, adaptés soit au territoire soit à la filière d’activité concernés. Les premiers travaux engagés par des réseaux d’acteurs (COORACE, Minga, France Active, …) laissent penser que cela peut se réaliser de manière assez simple.
La stratégie d’évaluation doit bien être comprise dès sa construction comme un moyen de repérage de la pratique et non comme un outil de jugement. C’est le meilleur moyen pour que les acteurs s’impliquent, pour repérer les bonnes pratiques et pour accompagner efficacement ceux qui rencontrent des difficultés sur une partie de leur action. Cela demande donc aussi une approche innovante de l’évaluation, pensée comme processus de soutien et non de sanction.
3- UNE DEMARCHE VERS UNE AUTRE MANIERE DE PENSER ET DE FAIRE LA POLITIQUE ET L’ECONOMIE
Le fait de partager les indicateurs et la méthodologie d’évaluation de l’utilité sociale entre acteurs et collectivités a un impact indéniable dans la structuration de l’ESS sur les territoires. En effet, les structures d’accompagnement des porteurs de projet peuvent améliorer leurs pratiques, en prenant en compte les dynamiques d’ESS attendues sur le territoire.
Plus globalement, cela conduit à faire autrement de la politique, où acteurs et collectivités se considèrent réellement comme partenaires, et se positionnent dans une co-construction. L’évaluation de l’impact de l’utilité sociale permet de faire évoluer les politiques publiques. A Nantes Métropole par exemple, des initiatives dans les quartiers ou autour du réemploi des déchets, accompagnés par le service ESS, sont désormais intégrés dans les politiques publiques de la ville ou de l’environnement.
Pour autant, le fait d’intégrer les politiques publiques doit se faire aussi par une évolution des pratiques des services concernés, pour ne pas repositionner ces initiatives citoyennes, qui se sont construites dans une démarche ascendante, en outil d’exécution descendants des volontés publiques. L’approche partenariale doit donc bien irriguer l’ensemble des services.
Enfin, aussi, la valorisation des démarches d’utilité sociale interpellent globalement les manières de faire de l’économie. Elles interrogent directement sur le sens de la production, de la consommation. Elles montrent qu’il est possible de faire autrement, en mettant au centre le bien-être individuel et collectif pour chacun. Elles questionnent la manière dont l’économie dominante répond (ou non) aux besoins de solidarités humaines, de responsabilité écologique, de finalité de l’économie.
L’économie est partie dans une dérive de la finance immédiate depuis quelques décennies. La prise en compte de l’utilité sociale montre qu’il est possible de sortir de cette impasse. Des structures d’insertion valorise des personnes même non diplômées, le commerce équitable interroge sur la construction des prix et la valeur des biens et du travail, les constructions de partenariat acteurs / collectivités interrogent sur les limites du « tout appel d’offre »… L’économie circulaire nous bouscule sur la représentation de nos modes de production et de consommation, et sur notre perception de ce qu’est un déchet…
Ainsi, la notion d’utilité sociale s’avère davantage être une utilité sociétale, support efficace pour repenser autrement l’économie, et pour la transformer, en prenant en compte les enjeux humains, sociaux, environnementaux et démocratiques, tels qu’avancés dans les « critères socles » présentés précédemment. Ainsi, la prise en compte de l’utilité sociale et sociétale permet de dépasser l’utilisation alibi de l’utilité sociale, qui valorise quelques belles réalisations, sans changer fondamentalement les pratiques des politiques publiques. Elle permet bien au contraire de donner des indicateurs et un chemin pour repenser l’économie et la politique.
4- COMMENT LES COLLECTIVITES PEUVENT ALLER PLUS LOIN ?
Dès à présent, l’intérêt de l’utilisation de la valorisation de l’utilité sociale et sociétale doit être débattu dans les collectivités. Pour ce faire, plusieurs étapes sont nécessaires :
Partager entre élus sur les différents modes de faire de l’économie, pour valoriser l’approche de l’ESS, de l’intérêt et de la possibilité de changer de paradigme, et donc de changer aussi la manière de penser le développement économique dans les collectivités. Les réussites actuelles sont déjà des preuves significatives de la pertinence de cette approche politique pour sortir de la crise. C’est par exemple ce que la Région PACA tente de développer avec son nouveau dispositif CEDRE (Contrat d’Expérimentation pour le Développement Responsable de l’Emploi), qui part des travaux réalisés pour l’utilité sociale dans l’ESS, pour s’intéresser désormais aux TPE et PME qui s’engagent sur une logique d’économie responsable.
Expliquer aux services l’intérêt et la force des indicateurs d’utilité sociétale, pour instruire des demandes de soutien financier. A partir de là, peu à peu, valoriser la richesse de se positionner dans une logique de partenariat, pour co-construire les politiques publiques avec les acteurs, ce qui est finalement beaucoup plus valorisant pour les techniciens que de simplement « gérer des dossiers » et se positionner en « censeurs ».
Construire aussi une culture commune entre collectivités d’un même territoire : commune, agglomération / Communauté de communes, Département, Région, pour affiner le socle commun et la procédure d’évaluation de l’utilité sociale, de manière à construire une démarche partagée et non pas juxtaposer des approches administratives.
Les expériences montrent la nécessité d’une très forte collaboration entre acteurs et collectivités (élus et techniciens en charge de l’ESS), avec l’appui de chercheurs-observateurs externes (Culture et promotion, Institut Godin…)
Le développement de la prise en compte de l’utilité sociale et sociétale dans les politiques publiques implique un changement de posture des élus locaux et nationaux, et de l’organisation des pouvoirs, déplaçant la logique de pouvoir d’une approche de domination (du pouvoir pour être) vers une approche de mise en œuvre (du pouvoir pour faire).
Reconnaître l’utilité sociale de pratiques économiques sur les territoires, c’est un formidable levier pour construire un nouveau paradigme économique, social, écologique et démocratique.
Alors que le mythe de la croissance financière sans fin et du PIB ne sont plus crédibles, la construction de politiques prenant en compte la notion d’utilité sociale et sociétale dans les pratiques socio-économiques permettra de redéfinir les valeurs essentielles de notre société : priorité à l’humain, à la solidarité, la démocratie, la responsabilité…
Le Réseau des Territoires pour l’Economie Solidaire réunit environ 70 collectivités (communes et EPCI, départements et régions) engagées dans des politiques d’ESS. Il permet à ses membres d’échanger, de mutualiser autour de leurs pratiques, et de les valoriser.
La question de l’utilité sociale et de son évaluation est au cœur aujourd’hui des réflexions de nombre d’acteurs de l’ESS, et rencontre celle de collectivités locales. Mise en évidence et renforcement de valeurs partagées, volonté de mise en pratiques au quotidien des valeurs, volonté de reconnaissance extérieure (tant auprès des pouvoirs publics que des citoyens), les raisons sont nombreuses qui amènent les acteurs de l’ESS à investir ce champ depuis une vingtaine d’années.
Ces questions rencontrent les préoccupations de collectivités locales, préoccupations renforcées aujourd’hui par le contexte européen encadrant les aides publiques à toute entreprise (y compris associative), et plaçant les services sous le régime de la libre concurrence, avec des exceptions possibles pour les services sociaux d’intérêt général.
C’est pourquoi le RTES a engagé une démarche d’action-recherche autour de l’utilité sociale, de l’intérêt général et des modalités de prise en compte dans les politiques publiques. Il s’agit de permettre aux collectivités locales d’approfondir et d’échanger leurs expériences, pratiques et difficultés rencontrées, et de construire avec les partenaires et réseaux d’acteurs intéressés un espace de dialogue, de meilleure connaissance réciproque et de concertation, plus que jamais nécessaire pour une reconnaissance des initiatives solidaires.
Le RTES a souhaité profiter des Etats Généraux de l’ESS pour rédiger une première contribution, fruit de ces réflexions et pratiques, présentée ici sous forme de Cahier d’Espérances. Il pourra servir de point d’appui pour avancer dans la mutualisation des bonnes pratiques, au fur et à mesure du développement des expérimentations.
Ce Cahier d’espérance a comme objectif de présenter quelques démarches pertinentes (aussi bien au niveau des outils que de la méthode) de co-construction d’indicateurs, de leur intégration dans les politiques publiques comme outils de diagnostic, de suivi et d’évaluation, et d’émettre quelques propositions et hypothèses pour favoriser un changement d’échelle.
Des premiers travaux de repérage et d’échanges engagés par le RTES, il ressort que des collectivités locales mobilisent depuis plusieurs années des critères d’utilité sociale dans le cadre de leur politique publique. Autour de la question d’indicateurs partagés et négociés, il s’agit d’identifier et de démontrer l’apport sociétal de l’ESS, et sa contribution au bien-vivre ensemble pour tous.
On peut souligner 3 caractéristiques des initiatives brièvement présentées ci-dessous:
faciliter l’identification du champ d’intervention de la collectivité locale, et donner des points de repère pour aider à la décision.
Impulser de nouveaux modes de relations entre collectivités et acteurs (co-construction des politiques publiques d’ESS) et, dans certains cas, à l’interne de la collectivité (culture commune et transversalité)
Permettre une meilleure lisibilité et donc un renforcement et une diffusion des pratiques solidaires
Identifier le champ d’intervention et aider à la décision
Dans la pratique, ce n’est pas tant la dimension statutaire qui motive une collectivité à construire un partenariat, mais ce que la structure représente comme « solidaire », justement « d’utilité sociale », qui rejoint les priorités de la collectivité et sa vision de l’intérêt général.
Et ce qui est d’utilité sociale ne peut être défini une fois pour toutes et indépendamment des territoires: par exemple, les circuits courts se sont imposés récemment comme éléments d’utilité sociale, comme le souligne Brest Métropole Océane.
Les collectivités ont donc besoin d’identifier ce qu’elles caractérisent à un moment donné comme relevant de l’utilité sociale.
En Haute-Normandie, la démarche a été engagée en réponse à un double besoin. D’une part, le Conseil Régional, dont le soutien à l’ESS est conséquent (1 million 500 euros, dont 500 000 euros d’appel à projet), était confronté à des questions sur les limites et les critères de son intervention. « A partir de quel moment peut-on parler d’ESS au sein d’un secteur d’activité, par exemple dans le domaine de l’agriculture, de la culture ou du tourisme solidaire? La Région soutient des projets socialement innovants. Quels critères se donner pour appréhender le caractère innovant? », souligne la chef de projet ESS en Région Haute-Normandie. D’autre part, les acteurs eux-mêmes étaient en demande d’une meilleure reconnaissance et d’une meilleure lisibilité. En 2009, l’ADRESS (Agence pour le Développement Régional de l’Economie Sociale et Solidaire) a lancé une démarche participative pour réaliser ce travail d’identification et de caractérisation des structures de l’ESS. Un groupe de travail a été mis en place, ouvert à des personnes non impliquées au quotidien dans l’ESS : membres du Conseil de Développement et du Conseil Economique et Social Régional, acteurs de l’économie classique, collectivités,…. Ce groupe de travail a rédigé, à partir de rencontres de terrain, un recueil des pratiques sur le territoire. Près de 80 structures ont participé à cette démarche. Le groupe n’a pas voulu travailler sur le repérage de critères, mais plutôt mettre en évidence des points de repère, notamment autour de la citoyenneté, du travail collectif, des plus-values économiques et pour le territoire, de l’articulation des ressources… , et des exemples de pratiques. Au sein de l’ADRESS, ce recueil sert de base de travail pour l’accueil des porteurs de projet. Pour le compléter, l’agence a noué un partenariat avec l’institut Godin , en participant à la phase test d’un tableau de bord des pratiques solidaires.
En Région Aquitaine, la démarche d’identification de critères est issue des travaux de Culture et Promotion. Dans le cadre d’un appel à projet « Mutualisation », une grille d’évaluation a été créée. Cinq dimensions ont été identifiées : la dimension économique, la dimension environnementale, la dimension sociale, la dimension politique et la dimension sociétale. Chacune de ces dimensions est déclinée en 3 ou 4 items plus précis notés de 0 à 5 en fonction de leur intégration ou non au projet ou de leur impact. La grille complétée permet de réaliser un sociogramme, base de discussion et d’évaluation pour le jury. Elle figure dans le dossier d’appel à projet, et est également utilisée pour le rapport d’activités.
Une démarche de co-construction et « facilitatrice » de transversalité
La co-construction des indicateurs avec les acteurs est un élément important de la démarche, comme présentée ci-dessus avec la Haute-Normandie.
En Provence-Alpes-Côte-d’Azur, la politique d’économie sociale et solidaire du Conseil Régional s’est appuyée sur un « Séminaire permanent », démarche participative qui a réuni plusieurs milliers d’intervenants (citoyens, entrepreneurs, universitaires, réseaux, politiques,…). Objectif : définir des critères de reconnaissance pour les projets qui relevaient du champ d’intervention de la politique ESS du Conseil Régional. Une grille de lecture composée de 9 critères a été établie. La sélection des projets se fait sur la base de ce travail. Il s’agissait également de sortir d’une approche uniquement statutaire en travaillant la notion d’utilité sociale, qui trouve appui sur la définition d’indicateurs par les acteurs eux-mêmes.
La Communauté Urbaine de Nantes Métropole a défini avec les acteurs (notamment CRES, Boutique de Gestion, Fondes, Ecossolies) des indicateurs, utilisés pour l’analyse des sollicitations issues de l’Appel à projet ESS. Ces acteurs sont réunis ensuite pour donner un avis, avant instruction par les services de Nantes Métropole. Sur les 60 projets retenus, une seule fois la collectivité n’a pas suivi l’avis du Comité.
En Haute-Marne, une quarantaine d’acteurs ont défini des indicateurs de différenciation de l’ESS. Ils les ont proposés aux collectivités, comme outil d’aide à la décision, face à la raréfaction des moyens financiers et au développement des logiques d’appels d’offre. Dans les autres cas observés, c’est le fruit d’un travail partagé.
Le travail engagé autour de la définition de critères d’utilité sociale contribue à la création d’une culture commune, et peut favoriser la transversalité.
Par exemple, la grille utilisée pour l’appel à projets « Mutualisation » intéresse aujourd’hui d’autres services de la Région Aquitaine.
« La logique de prise en compte de l’utilité sociale commence à apparaître dans certains autres services, sans pour autant conditionner les aides à ce critère, mais au moins pour valoriser des projets. On voit émerger une dynamique de transversalité » souligne le chargé de mission ESS en PACA.
Permettre une montée en qualité des structures, une meilleure lisibilité et une diffusion des pratiques solidaires
Pour Nantes Métropole, « l’utilisation de la grille d’indicateurs et l’accompagnement obligatoire des porteurs de projets retenus évite la marginalisation de certains projets, et engage les participants à soutenir le développement du projet ou à préconiser son repositionnement. C’est à la fois plus économe en argent public et plus engageant pour les parties prenantes ». De plus, suite à un financement dans le cadre de l’appel à projets, le renouvellement de subvention implique la constitution d’un groupe d’appui, composé des d’acteurs, autour de chaque projet. Cela oblige à démontrer l’utilité sociale, l’économie du projet, la transparence, la cohérence et l’ancrage dans le territoire.
En PACA, la logique de critérisation a évolué, pour aller vers le repérage des points de progrès sur la finalité et/ou sur les pratiques de projets. « Les indicateurs élaborés ne sont pas seulement un filtre pour sélectionner les projets mais aussi des outils d’accompagnement au service d’une démarche de progrès » selon le vice-président de la région PACA.
A noter que la mobilisation des indicateurs pour l’évaluation des projets, et a fortiori pour la mesure de l’impact sur le territoire, est encore peu développée. L’expérience de Nantes Métropole, qui vient de lancer une évaluation de son Appel à projet ESS 2009-2011, est à suivre: 3 questions principales sont prévues sur le dispositif d’appel à projet :
identifier la réalité de l’utilité sociale dans la pratique des projets soutenus,
évaluer la pertinence de la démarche de mesure de l’utilité sociale dans le processus
estimer l’impact de ces projets pour influencer plus globalement la politique publique.
Face aux crises, il est plus que jamais nécessaire de remettre l’utilité sociale et sociétale à l’ordre du jour et au cœur des choix politiques.