Cahier de l’entrée Participer / Démocratiser
Les personnes fragiles ou exclues de notre société que ce soit par le jeu de la précarité, d’un état de santé précaire, d’un handicap ou tout simplement par leur grand âge sont encore trop rarement consultées directement sur leurs désirs, leurs souhaits, leurs propositions pour des politiques adaptées à leurs besoins. La prise de conscience s’est faite tardivement pour les personnes en situation de handicap qui sont appelées à participer elles-mêmes aux prises de décision pour les politiques qui les concernent. Loin des volontés « émancipatrices » de ce secteur, la participation demeure au contraire quasi inexistante pour les personnes en situation de précarité et le « grand âge » reste dans les limbes avec une parole qui a du mal à se constituer à partir de la personne âgée elle-même et non de ses divers « accompagnants ». Ces personnes sont de fait des sous-citoyens car elles ne sont pas associées aux prises de décision qui les concernent. Cela dure depuis des siècles. Il faut sortir de ce sous-statut et donner une pleine et égale citoyenneté à tous.
La participation comme un nouveau droit, l’exercice de sa citoyenneté :
La participation est pour chacun une façon de s’affirmer en tant que citoyen, mais plus encore pour les personnes défavorisées elle est un moyen d’exister au sein de la société.
Mieux qu’une alternative, elle devrait constituer un droit pour tous, exercé partout, à commencer au sein des associations de solidarité, qui ont un réel impact sur l’opinion publique.
La participation est un des rares moyens de donner la parole à chacun sans oublier les plus exclus. Elle permet d’exercer sa liberté d’expression, souvent bafouée pour un grand nombre de personnes, et à ce titre devrait être considérée comme un progrès manifeste du respect et de la revendication des droits inaliénables.
Si la participation devient une pratique courante, un automatisme pour les associations, alors elle prendra de plus en plus de place dans les mentalités et peut-être pourra-t-on envisager un usage courant de la participation, appliquée à tous les organismes, et rendue indispensable à l’élaboration des politiques publiques.
Nous souhaitons que ces exemples contribuent à inciter les pouvoirs publics à intégrer de vraies démarches de participation dans leurs pratiques courantes … Et la participation est valable pour tous les secteurs !
Elle commence tout juste à se faire entendre dans le secteur sanitaire et social (loi du 2 janvier 2002 qui comporte un important volet sur le droit des usagers des institutions sociales et médico-sociales, loi du 4 mars 2002 aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui porte notamment sur la représentation des usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique, loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires qui prévoit une place à la représentation des personnes dans les instances locales de concertation) mais également dans des domaines plus précis comme la gestion des parcs forestiers sur une commune (concertations avec les habitants)… il faut élargir ces actions encourageantes !
La participation comme stratégie pour les associations :
La participation est un choix politique. Il suppose, on le voit, un changement de regard, un changement dans les pratiques des acteurs, et un engagement à donner toute leur place aux personnes bénéficiaires des politiques ou des actions qui sont mises en oeuvre pour elles.
Cela suppose aussi d’accepter le risque de la relation avec un autre qui n’a pas les mêmes repères que soi, d’accepter des déplacements de curseur en terme de rôle, de statut, de pouvoir dans la relation aidant/aidé, en donnant l’occasion aux personnes en difficulté de ne plus être les bénéficiaires passifs d’interventions sanitaires et sociales, mais les actrices de leur existence.
Dans tout processus de participation, deux facteurs sont indispensables à son fonctionnement : l’expression des personnes sur leurs besoins et attentes, et l’enclenchement d’une dynamique collective sur un territoire, dans un quartier ou une communauté.
Mais pour que celui-ci aboutisse, il est nécessaire que les personnes passent d’une situation où elles sont exclues à une situation où elles sont actrices d’un projet, au sens d’agir pour sa réalisation, les formes du projet pouvant être fort variées : réhabiliter ou adapter son logement ou encore y retourner – à ce sujet combien de fois le droit au libre choix de vie est remis en cause par l’impossibilité pour la personne de s’exprimer - , créer une association répondant à une demande sociale, créer sa propre entreprise, reprendre une activité salariée avec un, accompagnement adapté, militer, aider d’autres personnes en situation de fragilité…
Il est bien sûr artificiel de distinguer ce qui relèverait de l’expression, de la définition d’un projet, de l’élaboration de propositions d’action, et ce qui relèverait de l’action proprement dite. L’amont et l’aval sont étroitement liés ; les personnes accèdent progressivement à la position d’acteurs au travers d’une parole construite, élaborée en commun. Il s’agit néanmoins, là, de souligner l’importance de la participation des personnes jusque dans la finalisation d’un projet ou d’une action et dans leur mise en œuvre.
S’assurer aussi que la participation se traduise concrètement et à court terme par une amélioration des dispositifs d’insertion et des conditions de vie des personnes concernées est primordial pour les engagements futurs des personnes en situation d’exclusion. Dans le cas d’actions militantes ou visant à interpeller les responsables et décideurs d’une politique jusqu’à l’ensemble de la société, les résultats peuvent être plus longs à se concrétiser, mais l’accès à la position d’acteur collectif constitue, en soi, une avancée valorisante et libératrice.
Enfin, nous terminerons sur la conviction que si tout processus de participation repose, une fois lancé, en grande partie sur les personnes accueillies, les associations sont celles qui initient la démarche. Il ne suffit pas de réfléchir à la méthode, d’élaborer de grandes théories : il faut se lancer, « C’est en faisant qu’on apprend ». Qu’importe si la démarche bafouille au début, si tout ne se passe pas comme prévu. Dès lors que l’investissement est sincère, cela fonctionne.
Beaucoup d’ouvrages d’appui existent pour démarrer mais au final chacun est innovateur de la participation, c’est ce qui fait sa richesse.
UNIOPSS (Union nationale interfédérale des organismes privés sanitaires et sociaux)
L’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires
et sociaux) est une association française loi 1901 reconnue d’utilité publique.
Depuis 1947, l’Uniopss est présente sur tout le territoire national.
Elle regroupe 25 000 établissements et services privés à but non lucratif du secteur social, médico-social et sanitaire, au travers de :
23 Uriopss (Unions régionales) ;
110 fédérations et unions nationales de défense et de promotion des personnes,
de gestion d’établissements et de services, de soutien aux activités sociales, sanitaires, médico-sociales et socio-judiciaires ;
Cet ensemble représente environ 75% du secteur non lucratif de solidarité et emploie 750 000 salariés ;
Les missions de l’Uniopss :
Organiser une concertation et une représentation transversales aux secteurs traditionnels de l’action sanitaire et sociale (personnes âgées, personnes handicapées, enfance famille, pauvreté exclusion- santé…),
Valoriser le secteur à but non lucratif de solidarité, en France et en Europe,
en contribuant à sa modernisation,
Veiller aux intérêts des personnes fragiles dans la construction des politiques sociales, et faire le lien entre l’Etat, les pouvoirs publics territoriaux et les associations du secteur.
Les valeurs qui nous rassemblent : primauté de la personne, non lucrativité et solidarité, participation de tous à la vie de la société, innovation dans les réponses sociales, alimentée par l’observation des besoins.
Les adhérents de l’Uniopss, des Uriopss et des adhérents nationaux sont des personnes morales à but non lucratif ainsi que les établissements et services qui leur sont attachés.
Il peut s’agir de fédérations et de leurs représentants locaux, de personnes morales uniques d’implantation nationale, internationale, ou locale (régionale, départementale, municipale, etc.)
Ces structures ont en commun d’agir dans le secteur sanitaire, social et médico-social, auprès de personnes exclues, ou en situation de précarité, de personnes malades, handicapées, âgées, ou encore auprès de familles, d’enfants ou d’adolescents en difficulté.
L’Uniopss est membre du Collectif SSIG (www.ssig-fr.org), d’EAPN France et au niveau européen du CEDAG (Comité européen des associations d’intérêt général).
Plus d’informations : www.uniopss.asso.fr
Un message pour les pouvoirs publics :
Plus aucune politique publique ne doit être élaborée sans les personnes concernées. Cela implique une présence de personnes concernées dans toutes les instances où se débattent les politiques publiques. Cette dimension doit être prise en compte dans les textes (ce qui tend à se faire) mais doit surtout être effective en pratique avec des moyens mis à disposition pour permettre une réelle expression de ces personnes.
Une société ne s’enrichit que si tous ses membres participent pleinement à sa construction et à son évolution ; cela n’est possible que si chacun a pu s’émanciper pour être décideur de sa propre vie. Un processus de participation vise à ce que chacun puisse exercer totalement sa citoyenneté, et contribuer à l’intérêt général. Cela suppose qu’existent des lieux d’élaboration de parole collective, qui soient représentés dans les lieux de débat et de prise de décision relatifs à cet intérêt commun.
« Faire avec les personnes », et plus seulement « pour elles » : voilà qui donne un nouveau visage aux associations de solidarité. C’est ainsi que l’on peut découvrir que les personnes accueillies et accompagnées sont capables de se prendre en main et de contribuer à la vie de la société, de mener un projet en partenariat avec des acteurs sociaux et d’autres personnes. C’est par ailleurs à elles de définir leur projet de vie en fonction de leurs propres aspirations. Osons dire que si les personnes intéressées par une décision n’ont pas leur mot à dire, cette décision ne sera jamais aussi efficace et profitable qu’elle aurait pu l’être.
La prétention à la citoyenneté est-elle une requête si condamnable, si inaccessible ? Si les textes la garantissent avec des principes forts d’inclusion affirmés aux plans européen mais également national, la réalité le permet beaucoup moins pour ces personnes. Par la participation, elles ont enfin un moyen d’affirmer qu’elles aussi ont des droits, notamment celui de s’exprimer et d’être écoutées en tant que personnes à part entière au sein de la société, d’exister. Et la démarche commence au sein même des associations de solidarité.
Il existe de nombreuses expériences associatives de participation, mais il reste à les généraliser.
INITIATIVE 1 : L’expérience « IPAS » (insertion professionnelle et accompagnement social) pour les personnes en situation d’exclusion
On prendra ici l’exemple de l’expérience « IPAS » menée par l’URIOPSS Nord Pas de Calais.
L’Uriopss Nord - Pas-de-Calais a engagé en 2008 une démarche participative nommée « Insertion Professionnelle et Accompagnement Social » (Ipas). Avant d’expliquer les objectifs, la méthode et les résultats de cette démarche, il est nécessaire de rappeler quelques préalables.
Des préalables :
Les actions entreprises dans le cadre de ce projet s’inscrivent dans une continuité, celle initiée à Lens le 26 octobre 2006. Il y a trois ans, en effet, une nouvelle étape associative était franchie dans la lutte contre les exclusions : associations, institutions, syndicats, élus politiques et personnes en situation de précarité étaient réunis pour renforcer le pacte contre la pauvreté et les exclusions entériné dix ans auparavant par le collectif ALERTE Nord - Pas-de-Calais. Dans le prolongement de l’appel final signé, le 26 mai 2005, par le collectif ALERTE national et les partenaires sociaux, cette rencontre fut l’occasion d’une déclinaison régionale. Ce jour là, le collectif ALERTE et les partenaires sociaux du Nord - Pas-de-Calais se sont engagés à conjuguer leurs efforts pour renforcer la prévention et la lutte contre les exclusions et pour favoriser l’accès de chacun aux droits fondamentaux que sont l’emploi, le logement et la santé.
Une initiative singulière et multi-partenariale avec en son centre des « exclus » :
Il y a également le contexte actuel de l’insertion, celui de la ré-interrogation permanente des politiques d’insertion, qu’elles aient une portée nationale, régionale ou départementale. Les associations intégrées dans les dispositifs et en contact permanent avec les personnes ont le sentiment que les publics concernés sont éminemment sollicitables. Au moment où les dispositifs sociaux (logement, santé, formation professionnelle…) existants sont réinterrogés pour savoir s’ils bénéficient bien aux personnes les plus en difficultés, les paroles des personnes qui vivent les situations ainsi que celles des experts deviennent incontournables.
« Nous partons du constat que, depuis des années, et cela quel que soit le dispositif mis en œuvre, la parole est peu donnée aux bénéficiaires des minimas, du RMI… Nous ne sommes plus sur des demandes supplémentaires mais sur la mesure de l’efficience des politiques menées. Nous voulons surtout casser les représentations négatives et remobiliser les personnes » argumente Jean-Pierre Bultez, vice-président de l’Uriopss. C’est pourquoi, les réseaux associatifs que sont la Fnars, le Coorace, l’Uriae et l’Uriopss, les délégations régionales des partenaires sociaux dont FO, le Medef, la CGT, la CFDT, la CFTC et le CGPME se sont mobilisés sur le terrain pour recueillir les témoignages à l’égard des politiques d’insertion avec les trois entrées que sont les dimensions de l’insertion, la formation professionnelle initiale et continue et l’accès à l’emploi pour les personnes en situation de précarité.
Pour quelle finalité ? Aboutir à une démarche de mobilisation différente à l’égard des dispositifs en place.
L’émergence d’un nouveau partenariat :
Outre la dimension du projet et l’intérêt visible qu’il suscite auprès des associations et des publics concernés, l’autre point d’attractivité pour les réseaux associatifs et particulièrement pour l’Uriopss est la féconde collaboration mise en place autour du projet avec les syndicats. Collaboration qu’Elisabeth Bagault de la CFDT définit comme suit : « C’est une rencontre fructueuse car elle permet de partager des expériences et une connaissance du terrain différentes. Ce qui ne peut qu’enrichir le travail et nous enrichir mutuellement. Par ailleurs les revendications que nous pourrions être amenés à défendre seront plus crédibles si elles sont portées de manière collective par plusieurs acteurs ».
Il est également à noter que, depuis la signature de l’appel en 2006, c’est la première fois que le Medef s’associe physiquement à une démarche commune. Pour acter cette collégialité, les réunions sont animées, en tandem, par des représentants syndicaux et associatifs.
Thématiques et territoires :
Comment la société arrive-t-elle à progresser pour que ceux qui sont en incapacité de produire soient intégrés ?
Comment trouver sa place dans la société lorsqu’on ne correspond pas aux schémas imposés ? Quelles formations pour les publics sans emploi ?
Quelle adéquation entre le marché du travail et celui de la formation ?
Comment améliorer l’employabilité des personnes les plus éloignées ?
Que peut-on attendre de l’expérimentation du Revenu de Solidarité Active ?
Autant d’interrogations qui ont servi de trame à la série de réunions initiée conjointement par les associations et les partenaires sociaux dans six territoires définis autour des bassins d’emploi de la région : l’Arrageois, le bassin minier, les Flandres maritime et intérieure, le Hainaut Cambrésis, le littoral Pas-de-Calais et Lille-Roubaix-Tourcoing. Un territoire peut générer plusieurs groupes : ainsi, le Hainaut Cambrésis a occasionné deux réunions d’une soixantaine de personnes sur le Valenciennois, une sur l’Avesnois où un référent assure l’initiative par le biais de contacts associatifs individuels et deux réunions de vingt personnes dans le Cambrésis. Dans un premier temps, les réunions ont consisté à identifier les interlocuteurs, les partenaires de terrain pour ensuite donner libre cours à l’expression orale ou écrite des personnes en difficulté et celles des professionnels associatifs. Les acteurs institutionnels locaux ont été également invités à contribuer aux trois thématiques.
La parole aux « exclus » : la participation comme force de proposition et nouveau mode de gouvernance :
Les différentes contributions composées de constats, d’observations et de paroles ont été classées et regroupées au sein d’un livret. Un temps de restitution régional a concrétisé la démarche « insertion professionnelle et accompagnement social ». Elle a réuni plus de 500 participants au stade Bollaert de Lens. Les thèmes définis et les contributions des groupes de travail ont servi de base de travail et ont alimenté l’ensemble de la journée. Le débat de la journée s’est organisé autour de deux temps forts : une parole libre autour de constats et la rencontre avec des grands témoins invités pour l’occasion. Avec la présence des grands témoins, les échanges ont été plus techniques bien que tout aussi revendicatifs. Les personnes en insertion ont exprimé parfois avec calme, parfois avec violence, mais toujours avec émotion, leurs difficultés et leurs souhaits pour une société plus humaine.
Cette démarche a permis de faire ressortir 30 propositions qui ont été reprises dans les actes de la journée du 23 juin 2008. Elles sont variées, parfois précises d’autres fois moins, mais on retiendra que ces propositions sont issues de la parole des personnes en insertion. On soulignera également que ce projet a démontré l’efficience du fonctionnement participatif et l’intérêt d’une coordination entre le milieu associatif et les partenaires sociaux.
Des écueils à dépasser pour poursuivre la démarche :
La participation ne se décrète pas, mais elle se vit et doit se construire avec patience et abnégation. Au cours de la démarche « Insertion Professionnelle et Accompagnement Social » (Ipas), plusieurs écueils ont été repérés, tant dans les réunions territoriales que dans la journée de restitution et dans les suites de la démarche. Les personnes en insertion souhaitent trouver des solutions immédiates à leurs problèmes. Il faut développer beaucoup de pédagogie et rester humble dans le montage d’une action participative.
L’expression individuelle est un droit, mais au-delà, il faut se réinterroger sur nos modes d’animation et d’organisation, notre capacité à avoir à la fois une expression individuelle et une construction collective. Jusqu’où pouvons-nous aller dans l’expression des personnes ? Comment construire et porter les propositions formulées ? Comment maintenir une dynamique régionale participative ?
La logique d’ensemblier pour réussir la participation :
Pour réussir une démarche participative régionale, il faut identifier des partenaires sur les territoires qui porteront l’action et détermineront l’animation et le pilotage. Cela permet de gagner en crédibilité, en lisibilité générale et de mieux restituer les actions menées auprès des participants.
Cette démarche n’aurait pu se concrétiser et atteindre ses objectifs sans une forte mobilisation des personnes et des associations sur les territoires de la région. Grâce aux travaux engagés par de nombreuses associations, qui depuis des années, développent la libre expression des personnes, les réunions de terrain et la journée de restitution ont été riches en échanges. Les exclus sont des citoyens à part entière, ils savent s’exprimer et surtout portent des idées qui doivent être entendues tant au niveau local qu’au niveau départemental, ou au niveau régional etc.
On l’aura compris, l’objectif final de la démarche « Insertion Professionnelle et Accompagnement Social », qui est un projet collectif, vise à agir ensemble pour que demain les politiques et les dispositifs d’insertion se construisent à partir du terrain.
INITIATIVE 2 : Des rencontres européennes des personnes en situation de pauvreté
Les Rencontres européennes des personnes en situation de pauvreté » sont un forum où les personnes en situation de pauvreté et menacées d’exclusion sociale, issues des pays de l’UE, peuvent se rencontrer et engager le dialogue avec ceux qui mettent en œuvre les politiques et mesures aux niveaux national et européen.
Elles sont organisées par la présidence de l’Union européenne, via la Commission européenne, et avec le soutien d’EAPN (Réseau européen des associations de lutte contre la pauvreté).
Elles ont lieu tous les ans à Bruxelles depuis 2001 et s’inscrivent dans la politique d’inclusion sociale de la Méthode Ouverte de Coordination.
Les thèmes, depuis leur création, ont été les suivants :
1ère rencontre les 1er et 2 décembre 2001, à l’initiative du vice-Premier Ministre et Ministre du Budget, de l’Intégration sociale et de l’Economie sociale belge, Johan Vande Lanotte.
Elle a débouché sur une déclaration finale qui définit les conditions de la participation, et fait des propositions concrètes dans les domaines du logement, des revenus, de l’emploi et de la santé.
2ème rencontre 10 et 11 mai 2003, « Nous participons aussi à l’Europe! »
3ème rencontre 28 et 29 mai 2004, « La participation est plurielle »
4ème rencontre 10 et 11 juin 2005, « Images et perceptions de la pauvreté »
5ème rencontre 12 et 13 mai 2006, « Comment on se débrouille au quotidien »
6ème rencontre 4 et 5 mai 2007, « Expériences, progrès, perspectives »
7ème rencontre 16 et 17 mai 2008, « Quatre piliers dans la lutte contre la pauvreté »
8ème rencontre 15 et 16 mai 2009, « Ce qu’il nous faut là où nous vivons » : logement, inclusion financière et accès aux services de base.
Ces rencontres réunissent chaque année un plus grand nombre de personnes en difficultés et d’acteurs sociaux.
La participation est au cœur du débat et de nombreuses productions ont été publiées dans ce sens.
Cette pratique en a engendré bien d’autres, à des niveaux nationaux ou régionaux.
Les Rencontres Transfrontalières Franco-belges en sont un excellent exemple : la 1ère Rencontre Transfrontalière a eu lieu dans la mouvance de la 5ème Rencontre européenne, sur le même thème que celle-ci. Elles sont organisées tous les ans par les Uriopss Champagne Ardenne et Nord - Pas-de-Calais et les Réseaux Belge et wallon de lutte contre la Pauvreté.
Témoignages de personnes ayant fait l’expérience de démarches participatives :
Un travailleur social : « A laisser l’autre parler, il faut bien lui faire une place et donc bouger soi-même ! »
Des personnes en situation de pauvreté ou d’exclusion :
« On n’est pas évité, on est invité »
« La misère c’est quand on est pris pour des incapables »
« Ca fait du bien de venir au forum, ça permet de prendre la parole. En y participant, de plus en plus, on retrouve de la confiance en soi ».
« Il faut remettre l’être humain au centre de l’économie et de la société. Nous ne devons plus être des dommages collatéraux »
INITIATIVE 3 : Un collectif donne son avis sur le schéma départemental du handicap
L’expérience du collectif Réagir, dans les Hautes-Alpes, est d’une autre nature – c’est une initiative associative, qui s’est centrée sur schéma départemental et globalement, la politique du handicap dans le département . Le collectif a été créé en 2003, lors de l’année européenne des personnes handicapées, par l’APF et l’AFM. A l’époque, les associations du champ « se connaissaient très peu et étaient isolées les unes des autres ; les élus nous renvoyaient à nos chamailleries ». L’idée était de créer un lieu informel d’échanges et d’action groupant des associations de personnes handicapées, des professionnels et des usagers de structures.
Se retrouvent à Gap des gens d’horizons multiples : des associations toutes petites (par exemple des parents d’enfants trisomiques), des associations gestionnaires et d’usagers (APF, Adapei), des associations gestionnaires avec peu d’adhérents, comme l’Adsea. Des personnes en situation de handicap rejoignent le groupe, à titre individuel – des personnes handicapées motrice, une déficiente visuelle, des personnes sourdes – ainsi qu’une brochette de directeurs de structures.
Le collectif s’empare de la Déclaration de Madrid (2003), qui énonce des idées fortes : « …Il faut abandonner l’idée des personnes handicapées comme objets de charité, comme de simples patients ; il faut… que les professionnels renoncent à prendre des décisions au nom des personnes handicapées ». Le groupe parvient à « vendre » ce texte aux collectivités publiques partenaires – la région Pacac, la ville de Gap, les Hautes-Alpes l’adoptent.
Il commence à s’intéresser au schéma départemental handicap, qui devait être le premier du genre. En juillet 2007, le conseil général lance une invitation aux seuls directeurs de structures, pour créer un comité préparatoire au schéma. Outré, le collectif s’invite et réclame publiquement que les personnes en situation de handicap et les associations d’usagers soient aussi entendues. Finalement, entre octobre 2005 et juin 2006, il rédige une contribution de 80 pages, avec le soutien de l’Uriopss Pacac, qui propose une vraie politique du handicap sur le département. Le texte suggère ainsi l’ouverture d’une ligne téléphonique SOS, un dispositif de répit pour pallier l’usure des aidants familiaux, le développement de l’accueil temporaire, demande de faire de la « formation adaptée » une priorité des MDPH, etc. .
Autre action également à noter à l’actif du collectif : des personnes handicapées du Collectif sont intervenues directement dans les stages de formation de personnel petite enfance, pour les sensibiliser à l’accueil en crèche d’enfants handicapés. Les expériences peuvent être multiples et il suffit parfois de volontés individuelles qui se rencontrent.
L’heure est cependant aujourd’hui au désenchantement : le département des Hautes Alpes, en bout de course comme nombre de départements, a surtout créé des places en institution et les propositions du collectif sont restées lettre morte… Quid donc de la participation, si les politiques ne suivent pas ?
Donner la citoyenneté à tous en faisant participer toutes les personnes, même celles en grande difficulté.