Cahier de l’entrée Financer / épargner
Alors que l’Afrique détient des richesses naturelles multiples, la population du continent doit importer pour se nourrir et le décollage économique n’est pas réellement au rendez-vous ; et pour cause ces richesses sont bradées aux sociétés trans nationales qui transforment ces produits bruts au Nord, sans valeur ajoutée pour l’Afrique. Il s’agit là d’une nouvelle forme de colonialisation.
Les Objectifs de Développement pour le Millénaire (ODM) sont plein de bonnes intentions lorsqu’ils déclarent vouloir réduire la pauvreté ; à mi-parcours le constat est que l’on est encore très loin des objectifs initiaux. Si la réduction de la pauvreté est une mesure palliative en situation d’urgence, pourquoi ne pas se préoccuper plutôt de création de richesse locale, seule solution pérenne pour lutter contre la pauvreté ?
Face au chômage et à la crise globalisée, au Sud comme au Nord, la panacée serait l’auto emploi ; pourquoi ces emplois « faute de mieux » comme le dit très justement Esther DUFLO (Le Monde - 12 janvier 2010) ? Tout le monde n’est pas fait pour être entrepreneur ; les décideurs, ici et en Afrique, doivent concevoir et mettre en place des mécanismes de financement et d’accompagnement de ces PME qui créent des emplois pérennes.
Il nous faut faire connaître notre initiative auprès de souscripteurs potentiels ; pour cela nous devons communiquer auprès d’un large public et mobiliser nos souscripteurs pour qu’ils renouvellent leur souscription.
Nous devons assurer le développement du FA dans les pays actuels d’intervention et dans de nouveaux pays africains ; cela suppose
de la communication par nos partenaires africains dans leur pays, communication ciblée vers des très petites et petites entreprises partageant notre objectif d’utilité sociétale,
de la prospection par TECH DEV pour identifier des partenaires fiables,dans des nouveaux pays, qui partagent notre éthique .
Les conditions de développement du Fonds Afrique sont de trois types :
les souscripteurs ici en France continuent à nous faire confiance et souscrivent des parts sociales de GARRIGUE, fléchées vers le FA ;
les aides de l’Etat (avantages fiscaux) sont maintenues ; cette condition est en danger avec les nouvelles mesures « rabot » applicables depuis novembre 2010.
La garantie publique des investissements (50% de l’exposition en cas de faillite) doit être maintenue (actuellement assurée par ARIZ / AFD).
Création du Fonds Afrique : septembre 2005
Chiffres clés au 31 décembre 2010 :
épargne collectée par GARRIGUE, fléchée vers l’Afrique : 576 000 Euros (135 souscripteurs)
13 entreprises ont ouvert leur capital à GARRIGUE (50% d’entre elles se sont constituées en Sarl pour accueillir leur nouvel associé)
Investissements dans 4 pays différents (Bénin, Burkina Faso, Sénégal, Congo)
Objectifs à l’horizon 2014 :
Epargne collectée : 2 400 000 €
53 investissements dans 8 à 10 pays africains différents.
Le Fonds Afrique n’a que 6 ans d’existence ; il en est donc encore à sa phase pilote ; les 5 années à venir doivent nous permettre, avec l’appui de l’AFD, d’atteindre notre vitesse de croisière.
Le changement d’échelle deviendra alors possible en délocalisant le Fonds Afrique en Afrique : création de fonds d’investissement locaux faisant appel à l’épargne privé nationale et intervenant suivant la même charte éthique que GARRIGUE et TECH DEV ; ces fonds bénéficieront de l’appui technique de TECH DEV et financier de GARRIGUE qui pourra alors intervenir en tant que « fonds de fonds ».
L’engouement de nos souscripteurs pour cette initiative est un facteur de succès indéniable ; les retours de l’enquête que nous venons de lancer montrent que les souscripteurs recherchent des placements socialement utiles et sont prêts à abandonner la recherche d’un profit financier ; de plus ils veulent « faire quelque chose pour l’Afrique ».
ar ailleurs les partenaires tissent des relations dans la durée avec les chefs d’entreprise, sources d’innovation et de progrès pour les deux parties ; les premières « sorties » du capital sont difficiles car les entreprises voudraient bien continuer avec de nouveaux prêts mais ce n’est pas la vocation d’un capital risqueur que de rester trop longtemps et il faut que le fonds puisse servir à de nouvelles entreprises.
L’expérience de ces 5 premières années de fonctionnement nous permet d’affirmer que l’intérêt pour les petites entreprises africaines est double :
elles accèdent à une source de financement dont le coût est compatible avec le rendement financier de leur activité alors que les dispositifs de prêt des IMF (Institutions de micro finance) ou des banques commerciales ne répondent plus ou pas encore à leurs besoins
elles font entrer dans leur entreprise un partenaire financier ET technique qui est en mesure de les accompagner dans leur plan de développement.
Le Fonds Afrique est un dispositif de « mésofinance », s’inscrivant en aval des institutions de micro crédit lorsque celles-ci ne sont plus à même de répondre aux besoins de financement des très petites et petites entreprises et en aval des banques commerciales qui ne s’intéressent pas à cette clientèle, jugée trop risquée.
Il est abondé par l’épargne de personnes physiques qui, dans une démarche de solidarité, privilégient le caractère « socialement utile » de leur investissement plutôt que la rentabilité financière.
Il ne s’agit pas d’un don mais d’un placement solidaire qui contribue intégralement au développement des petites entreprises : 1 Euro souscrit = 1 Euro investi.
GARRIGUE étant labellisée solidaire, les épargnants bénéficient d’avantages fiscaux (déduction de 22% du montant de la souscription sur l’IRPP ou de 50% sur l’ISF, au choix du souscripteur).
Les partenaires africains de TECH DEV font remonter les demandes de financement qui sont examinées à Paris par un Comité d’Engagement. Au delà des critères de risque (au moins 2 années d’activité, existence de comptes auditables, existence d’un projet de dveloppement crédible, entreprise déclarée ou volonté de s’enregistrer), le Comité évalue la demande à l’aune de critères d’utilité sociétale (impact positif - a minima neutre - sur l’environnement, des produits utiles et de qualité pour le marché africain, valorisation des ressources locales avec effet d’entraînement en amont de l’entreprise, création et pérennisation d’emplois salariés, création de valeur ajoutée sur place et répartition équitable).
Le Fonds Afrique investit dans l’entreprise sous forme d’une prise de participation au capital, toujours minoritaire - inférieure à 30%, et par une avance en compte courant d’associé (différé de remboursement d’au moins 9 mois, durée du prêt 36 à 48 mois, taux d’intérêt 7,5 % sur le principal restant dû).
TECH DEV et son partenaire local accompagnent l’entreprise pour la réalisation de son plan de développement. Ainsi le Fonds Afrique couple et l’appui financier et l’appui technique, condition nécéssaire pour la réussite de l’entreprise (un financement sans accompagnement est voué à l’échec, un appui technique sans financement n’est pas suffisant).
GARRIGUE cherchera à revendre sa prise de participation après 5 à 7 ans de présence dans l’entreprise.
L’appui financier de l’AFD pour 4 ans (2011 - 2014) permet à TECH DEV notamment de renforcer la structure par le recrutement d’un salarié permanent qui prend en charge la gestion du portefeuille Fonds Afrique.
Le fonds Afrique doit atteindre un niveau de capitalisation suffisant pour que les intérêts générés par les investissements dans les entreprises couvrent les frais de fonctionnement en France, ceci afin de continuer à assurer les souscripteurs que « 1 Euro souscrit = 1 Euro investi ».
Le Fonds Afrique (FA) est porté par
GARRIGUE qui ouvre son fonds d’investissement aux petites entreprises africaines « d’utilité sociétale »,
TECH DEV, association de solidarité internationale créée en 1994 qui avec son réseau d’experts bénévoles apporte un appui technique, commercial et financier. GARRIGUE confie à TECH DEV la gestion déléguée de la partie du fonds dédiée à l’Afrique.
Les partenaires de TECH DEV en Afrique sont la cheville ouvrière de la chaîne de confiance qui relie l’épargnant en France et l’entrepreneur « socialement utile » en Afrique ; ces partenaires, structures locales de services d’appui aux entreprises, ajoutent à leur panoplie de services, l’accès au financement du développement des très petites et petites entreprises qu’ils accompagnent.
Les partenaires doivent progressivement s’approprier l’outil et trouver le moyen de le développer localement (fonds privés africains)
En tant que citoyen responsable, avec la finance solidaire, vous pouvez donner du sens à votre épargne.
Les initiatives citoyennes ont besoin pour se développer d’appuis financiers qui ne doivent pas remettre en cause leur indépendance mais simplement leur permettre d’atteindre leur point d’équilibre financier.
Il est indispensable de réfléchir avec nos partenaires africains comment l’ESS se décline dans le contexte africain (ne faisons pas de « copié - collé »).
Le Fonds Afrique est un dispositif innovant qui apporte une réponse à la problématique de la méso finance (financement de la création et du développement des petites entreprises, entre le micro crédit et le secteur des banques commerciales) ; ce dispositif a sdémontré sa pertinence.
Il nous faut pouvoir afficher des « success stories » de petites entreprises du portefeuille dont le niveau d’activité aura décollé pendant les 5 années de présence du FA au capital, se traduisant par la création de nouveaux emplois et la consolidation des emplois existants.
Nous faisons la preuve qu’il est possible, chacun à son niveau, de faire oeuvre utile pour le continent africain, et ceci avec son épargne ; de même que le consommateur agit pour un monde un peu moins injuste lorsqu’il achète « équitable », l’épargnant peut donner du sens à son argent en choisissant des placements solidaires avec les petites entreprises africaines.
Au-delà d’une logique de don, il est possible d’épargner sans but spéculatif avec l’objectif d’être utile socialement ; le « rendement » du placement n’est plus financier, il se trouve dans la satisfaction d’avoir fait oeuvre utile.
GARRIGUE, coopérative de mutualisation du risque fait appel depuis plus de 25 ans à l’épargne en France pour investir, aux côtés des CIGALES (Clubs d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne Solidaire), dans l’economie sociale et solidaire en Franxce (voir à ce sujet le cahier d’éspérance de D. CARLIEZ « épargner et investir en circuit court »).
GARRIGUE, avec TECH DEV, a créé en 2005 une section « Afrique » dans son fonds d’investissement ; ensemble nous faisons la preuve que comme GARRIGUE en France, le Fonds Afrique propose de donner du sens à votre épargne en l’investissant dans des petites entreprises locales qui répondent à nos critères d’utilité sociétale. En intervenant en capital risqueur solidaire en Afrique, nous accompagnons financièrement et techniquement ces entrepreneurs avec pour objectif de créer et de consolider des emplois salariés durables sur place.
Le FA développe des alliances avec des Institutions de Micro Finance pour lesquelles le FA représente une opportunité de financement pour leurs clients qui « sortent par le haut » de leur institution.
Le Fonds Afrique s’appuie sur les ressources bénévoles de TECH DEV (son réseau d’experts), du Comité d’Engagement (10 souscripteurs bénévoles qui souhaitent s’impliquer davantage et qui ont les compétences complémentaires nécessairs pour cette fonction) et de GARRIGUE (Directoire).
Le développement du Fonds Afrique requiert des subventions pour :
le cofinancement des services rendus par les partenaires africains (50% à la charge de l’entreprise, 50% à la charge de TECH DEV) : la fondation JMA (2006 - 2008), puis ICCO (2009 - 2011) puis l’AFD (2011 - 2014) nous appuient financièrement à ce niveau ;
les coûts de fonctionnement minima en France (frais de bureau, salarié en charge de la gestion du portefeuille, frais de voyage en Afrique) sont financés par une quote part (30%) des intérêts perçus sur les comptes courants d’associés,complétée par une subvention de l’AFD (2011 - 2014) et les fonds propres de TECH DEV .
Nos pays développés ont une responsabilité dans la situation actuelle de marasme économique de l’Afrique et nous ne pouvons pas nous contenter de déclarations sur « la lutte contre la pauvreté » tout en continuant à piller les ressources de ce continent.
Questionnaire adressé en 2008 par JMA à quelques entreprises du portefeuille :
Dominique SOUATY, gérant de SAVON PLUS au Congo :
A la question « que vous a apporté le FJEC, partenaire de TECH DEV au Congo ? » Dominique a répondu :
« - Un meilleur suivi de notre gestion, une comptabilité régulièrement suivie chaque semaine et la mise à disposition de l’entreprise d’un tableau de bord et d’un rapport de gestion mensuel.
Une assistance dans la recherche d’informations relatives à notre activité (documents sur la saponification). »
Abou TAGNAN, Directeur de la coopérative de femmes transformatrices de beurre de karité au Burkina Faso :
« Nous apprécions positivement la démarche de TECH-DEV qui a pris l’initiative de nous accompagner tout au long du processus de collaboration avec le Fonds GARRIGUE et nous estimons cela nous a imprimé une certaine rigueur de travail et de rapportage qui est bénéfique pour notre entreprise. »
Tournage en juillet 2008 du DVD téléchargeable sur www.tech-dev.org/fonds-afrique/ :
Cyr DAVODOUN, patron du Bureau d’Appui aux Artisans, partenaire de TECH DEV au Bénin :
« c’est très difficile pour les micro entrepreneurs d’accéder aux banques primaires, ils ont besoin de ce ballon d’oxygène que leur amène le Fonds GARRIGUE »
Gildas NDALA, Responsable de l’antenne du JFEC à Pointe Noire (partenaire de TECH DEV au Congo) :
« on dit aux entreprises ce qu’elles doivent faire mais où est-ce qu’on peut avoir de l’argent ? »
Parfait KISSITA, gérant de CUBA LIBRE (fabrication de jus naturels pasteurisés) à Pointe Noire :
« vu les succès de nos produits sur le marché et pour ne pas rester archaïque nous avons recherché un partenaire plus puissant et qui pourrait nous prêter de l’argent pour que nous puissions améliorer nos conditions de travail »
Dominiquze SOUATY, gérant de SAVON PLUS à Pointe Noire : « le Forum pouvait nous soutenir avec des petits prêts mais c’était insuffisant pour le développement de l’entreprise ; avec GARRIGUE je gagne en expérience et en conseil …. Ce qu’il faut arriver à faire c’est mettre les entreprises du Fonds Afrique en réseau et qu’elles puissent se rencontrer. »
Entretien avec Moumouni Konaté (Gérant de la SPH au Burkina Faso) à Paris avec le groupe de travail « impact social » en novembre 2009 (Moumouni ayant été invité par Finansol pendant la semaine de la finance solidaire)
A la question « qu’apportez-vous comme contribution au bien commun ? » Moumouni répond « tout d’abord un outil de développement économique : 13 personnes vivent de la SPH, donc 13 foyers qui envoient les enfants à l’école, qui peuvent se nourrir et se réaliser par leur travail … ensuite l’entreprise est un outil pour satisfaire les besoins de la population : l’entreprise créée des produits de qualité ; les clients s’adressent au dirigeant pour lui dire « ton produit est bien, je suis content ».
A la question de la pérennité de l’entreprise (et après vous que se passe-t-il ?) Moumouni explique qu’il implique sa famille pour prendre la relève ; ses fils sont formés et travaillent avec lui ; son fils aîné a 27 ans, il est le chef de production depuis 4 ans ; il a vocation à devenir son bras droit… il faut voir l’entreprise comme appartenant aux associés (il est SARL depuis 5 ans et il pense que c’est bien) mais aussi à chaque salarié « notre entreprise, pas mon entreprise, tout seul aucun fondateur ne peut répondre aux commandes, mes salariés sont pour la plupart là depuis le début ».