Cahier de l’entrée Consommer / Se nourrir
1. Freins financiers : se nourrir et nourrir sa famille, un besoin vital
Les personnes fragiles économiquement n’ont pas accès à une alimentation de qualité et ont des difficultés à se nourrir et à nourrir leur famille (augmentation des bénéficiaires des associations d’aide alimentaire).
Les chiffres en France et en région :
Le manque d’accès à des produits frais non transformés se caractérise par la prévalence de l’obésité, qui augmente en France dans toutes les catégories professionnelles et dans toutes les tailles d’agglomérations mais reste inversement proportionnelle au niveau d’instruction et de revenus du foyer.
Un tiers des Français n’a pas les moyens de s’offrir une alimentation saine et équilibrée, cette proportion montant à 39% chez les employés et à 42% chez les ouvriers.Les inégalités d’accès à une alimentation saine et équilibrée sont encore plus fortes, touchant près d’une personne sur deux (46%) dans les foyers les plus modestes (moins de 1 200 € nets par mois), contre seulement 12% des individus dans les foyers les plus riches (3 000 € nets par mois)
La part du budget des ménages allouée à l’alimentation diminue, compressée par la part des budgets loyer et énergie.
En Nord-Pas-de-Calais, le PIB par habitant se situe parmi les plus faibles de France métropolitaine ( 23 800 € ) et représente 79% par comparaison aux données nationales.
(résultats de l’enquête d’OBEPI-Roche 2009)
D’une manière générale, et cela se retrouve sur les thématiques alimentaires, l’écart se creuse entre les individus et un nombre de plus en plus important de personnes n’arrivent pas à répondre aux besoins fondamentaux que sont par exemple la nourriture et le logement.
2. Le malaise alimentaire : comment accéder à la nourriture, et à quelle qualité de nourriture
Face à un système alimentaire qui se complexifie, le citoyen perd ses repères, ce qui engendre des peurs alimentaires. En effet, son fonctionnement, ses enjeux et les controverses qu’ils soulèvent ne sont pas facilement intelligibles à la plupart des citoyens. Leur compréhension mobilise des connaissances économiques, politiques, sociales et l’accès aux données de la controverse.
Les avancées techniques des dernières décennies ont permis d’augmenter la production alimentaire mondiale tout en abaissant son coût. Mais la perception qu’ont les consommateurs du coût de l’alimentation ne semble pas aller dans le même sens, le malaise alimentaire ne cesse de grandir, au point que la sécurité alimentaire semble compromise.
La sécurité alimentaire se décline de deux manières. La première touche à l’assurance pour tous d’accéder à une quantité de nourriture suffisante. La sécurité alimentaire s’entend aussi par le caractère non-dangereux pour la santé de l’alimentation.
3. Les freins culturels à une alimentation de qualité/saine :
Les freins financiers ne sont pas les seuls facteurs qui déterminent la faisabilité de l’accès d’une partie de la population de notre territoire à une alimentation de qualité. Même s’ils existent bel et bien, il ne faut pas se contenter de ces seuls facteurs explicatifs sous peine de mettre en péril la réelle efficacité et la pertinence, tant d’un point de vue économique que sanitaire ou social, des actions menées sur l’alimentation de qualité.
Ainsi, les acteurs soucieux de favoriser l’accessibilité financière à des produits de qualité pour tous, constatent que manger des produits frais est très souvent moins onéreux en réalité que de consommer les plats transformés proposés par l’industrie agro-alimentaire et distribués notamment en grandes surfaces. Cependant, cette consommation nécessite des savoir-faire et une organisation différente. A la limitation des moyens financiers, s’ajoutent, bien souvent, un frein culturel et un déficit de savoir-faire culinaires et vivriers.
Aussi, il convient de ne pas se borner à favoriser l’accès à des produits frais pour les plus précaires mais de mener un travail de sensibilisation, de transmission et de partage de savoir-faire et de mobilité culturelle.
Cela pour permettre aux consommateurs d’exercer pleinement leur citoyenneté et d’adopter un comportement alimentaire critique et responsable.
4. Repenser une politique alimentaire globale
Aujourd’hui malgré la forte demande des consommateurs en terme d’alimentation saine/bio, l’offre est insuffisante. L’illusion du bio à un euro dans les grandes et moyennes surfaces cache des pratiques économiques non équitables.
La formation décourage les jeunes de s’installer, tout comme les difficultés à accéder à la terre.
On constate que l’offre ne suit pas la demande faute d’une politique volontaire de soutien de l’agriculture paysanne et d’aménagement des espaces péri-urbains en fonction des besoins alimentaires.
Conclusion :
L’alimentation est un besoin humain fondamental. Par ses interactions avec des facteurs économiques, sociaux, écologiques mais aussi par sa dimension éminemment subjective et intime, l’alimentation cristallise les tensions liées à notre mode de développement. L’économie sociale et solidaire, désireuse de porter un projet de société plus équitable et harmonieux, en redonnant la prépondérance à l’homme sur l’économie et en lui donnant une véritable place d’acteur, propose des solutions originales, viables et équitables à apporter aux problèmes liés à l’alimentation.
1. Favoriser l’accès au foncier
Dans une région aussi fortement urbanisée que le Nord-Pas-de-Calais, l’accès au foncier est bien entendu un levier important des projets, particulièrement difficile à actionner. Souvent, les projets de circuit court en paniers ne demandent pas de très grandes surfaces de culture mais il reste encore difficile d’accéder à la terre, à plus forte raison en zone périurbaine, pour approvisionner la population.
Il s’agit donc d’agir sur la ressource foncière, au centre de pressions fortes sur le territoire régional en raison de conflits d’usage. Il n’est pas simple d’agir sur cette ressource; en effet, sa gestion est étroitement surveillée par les pouvoirs publics dans une visée d’aménagement durable du territoire et de protection de la propriété privée mais son prix est très fortement déterminé par les fluctuations du marché. Aujourd’hui, en raison du prix à l’hectare, de nombreux agriculteurs peinent à s’installer.
Quelles sont aujourd’hui les marges de manœuvres en terme de foncier ?
La recherche de foncier pour des projets d’agriculture de proximité gagnerait à trouver une place au sein des politiques publiques.
En région, la préservation des zones de réserve de l’eau a pu se coupler à des projets agricoles respectueux de l’environnement. Ainsi, dans notre région, la politique de trame verte et bleue peut développer une adéquation heureuse avec le maintien d’une agriculture de proximité et respectueuse de l’environnement.
Des solutions existent déjà au niveau de la société civile pour la maîtrise du foncier dans leurs projets agricoles. Par exemple, l’association Terre de Liens travaille sur la question de l’accès au foncier et accompagne des personnes ou des collectifs qui s’installent en milieu rural via l’achat collectif de foncier dans un but de solidarité avec les producteurs. Elle considère que c’est un moyen de redonner à la société, aux paysans et à l’ensemble des acteurs et actrices ruraux une certaine maîtrise de l’usage de la terre et de leur patrimoine bâti. L’achat collectif de foncier et de bâti participe à la re-création d’un lien social dans les territoires ruraux. Une association régionale a été créée en Nord-Pas-de-Calais.
2. Intégration dans les politiques d’aménagement du territoire et de développement économique et transversalité avec une gouvernance qui privilégie l’approche territoriale
Au-delà de la question foncière stricte, dont l’enjeu aujourd’hui est de trouver des terres pour des projets de circuit court de proximité, il est nécessaire de porter la question alimentaire au niveau de l’aménagement des territoires, de l’environnement, de la citoyenneté, de l’emploi…
En effet, l’aménagement du territoire regroupe les actions menées par les pouvoirs publics afin de favoriser le développement des régions. Pour cela, il porte sur la disposition spatiale des hommes et des activités. Il conjugue donc développement économique, habitat, transports et communications dans le Schéma Régional d’Aménagement et de Développement des Territoires (SRADT). Il fixe les orientations fondamentales à moyen terme, de développement durable du territoire régional. Il définit les objectifs de la région en matière de localisation des grands équipements, des infrastructures et des services d’intérêt général, de développement des projets économiques porteurs d’investissements et d’emplois, de développement harmonieux des territoires urbains, périurbains et ruraux, de protection et de mise en valeur de l’environnement, des sites, des paysages et du patrimoine naturel et urbain.
Si l’on tient compte à la fois de l’impératif de préservation des ressources naturelles, de développement des territoires, des initiatives alimentaires originales qui maillent nos territoires et de l’épineuse question foncière, il semble important de mener aujourd’hui une réflexion sur l’organisation des activités nourricières sur les territoires.
En effet, les activités nourricières en circuit court de proximité permettent de répondre aux enjeux alimentaires tout en s’inscrivant dans des dynamiques de développement durable des territoires (préservation de l’environnement, création d’emploi…). Au vu des enjeux, l’inscription de la fonction nourricière de façon large (en sortant de la fonction agricole stricte, qui a déjà des zonages dédiés dans les Plans Locaux d’urbanisme) permettrait de la mettre en cohérence avec les autres occupations du sol que sont le logement, le transport, les activités économiques, les zones naturelles et d’avoir des visions dans le temps.
Il faudrait considérer la fonction alimentaire dans son sens large. Cela permettrait de prendre en compte à la fois l’agriculture paysanne qui abonde les circuits courts de proximité mais aussi les zones d’autoproduction, en zone urbaine et péri urbaine. Dans le cadre de leur Plan Local de Développement Economique, certains territoires mènent aujourd’hui des expérimentations prometteuses.
Des conseils locaux de l’alimentation rassemblant l’ensemble du monde agricole, des élus aux divers mandats, des consommateurs, des épargnants pourraient être installés sur les territoires.
Il y a nécessité d’une instance avec un rôle d’éclairage de l’action publique régionale, en faveur de la sécurité alimentaire et de préservation des ressources incluant des initiatives de proximité, de cohésion sociale. A ce titre, il serait pertinent d’amener des éléments à la fois sur les différents scénarii de développement des circuits courts alimentaires, les enjeux de taille critique et la population touchée sur le territoire régional en croisant avec les enjeux d’aménagement du territoire et de foncier autour du concept large de souveraineté alimentaire.
On aurait là une réflexion en mesure d’être force de proposition auprès des collectivités tant du point de vue de l’accompagnement des initiatives, de sensibilisation et d’accès au public que de l’enjeu foncier.
Cette instance, à la fois point de rencontre et de mutualisation de l’existant, cellule opérationnelle et cellule de réflexion, se devrait de regrouper les acteurs au sens large de la question alimentaire, qui sont souvent déjà organisés entre eux : réseaux de producteurs bio, d’agriculture paysanne, d’épiceries solidaires, de jardins…
Avec un cadre de contribution et d’éclairage que les acteurs seuls ne peuvent pas faire (y compris de la mobilisation d’expertise extra-régionale).
Mais aussi un cadre de mutualisation pour les projets que ce soit par les réseaux, par la connaissance, l’amélioration des savoir-faire, de renforcement des capacités économiques, une articulation territoriale des acteurs sera une plus-value pour les porteurs de projet
3. Promouvoir le métier de producteur, la formation et l’accompagnement :
Producteur en circuit court de proximité, un métier nouveau à s’approprier, et de nouvelles collaborations
Produire pour des paniers, dans le cadre de circuit court de proximité à caractère coopératif, implique des compétences variées qui constituent un nouveau métier.
Tout d’abord, en terme de production, il faut pouvoir maîtriser les méthodes culturales de l’agriculture biologique le cas échéant, travailler une grande variété de produits et avoir une planification précise des cultures.
De plus, le lien direct avec les adhérents nécessite des compétences techniques particulières comme la relation avec les adhérents, la comptabilité, la gestion du fichier d’adhérents. En effet, les démarches en circuit court coopératif se caractérisent par un contact direct entre le producteur et ses consommateurs. Le producteur est en contact au sein d’une organisation collective avec les consommateurs et, selon l’organisation du circuit court, il est amené à prendre des décisions en concertation avec les adhérents. De même, lors de moments collectifs, que ce soit sur les points de dépôts, lors de visites sur site ou de réunions, il est amené à avoir des contacts variés avec les consommateurs, et à répondre à leurs interrogations aussi diverses que leurs motivations de départ.
Pour accompagner ce nouveau métier, il convient d’accompagner et de former les producteurs. Des initiatives se mettent en place dans certains lycées agricoles, comme celui de former les futurs agriculteurs aux méthodes de l’agro écologie. De même, le Germoir, à Ambricourt, permet à des porteurs de projet en agriculture bio de tester, pendant 1 ou 2 cycles de production, les cultures de leur choix sur un site de quatre hectares.
On pourrait aussi imaginer la mise en place d’un dispositif ambitieux de compagnonnage. En effet, la diversité des projets portés implique de la mutualisation de compétences, complémentaire à l’acquisition de savoir « hors les champs », pour respecter la diversité des projets portés. Par la diversité des initiatives, la formation implique une co-construction, un échange d’expériences.
Cette transmission par compagnonnage permettrait aux porteurs d’apprendre sur le terrain et de s’enrichir des diverses expériences mais aussi de faire un lien, de garantir des échanges et des mutualisations entre les différents projets.
Pour celles et ceux qui ne souhaiteraient appréhender qu’une facette de ce métier, de nouvelles manières de faire en terme de collaboration et de partenariat sont également à acquérir.
4. Il reste déterminant d’agir sur la Politique Agricole Commune.
L’exemple d’un modèle économique pérenne : l’entreprise de restauration collective Croc la Vie
Le passage de la SARL à la SCIC (Société Commerciale d’Intérêt Collectif), prévu au bout de 3 ans d’ancienneté, sera la concrétisation sociale et solidaire de Croc La Vie.
Croc La Vie deviendra alors une coopérative. Elle produira et commercialisera des biens d’utilité sociale et sociétale. Tous les associés seront impliqués démocratiquement dans la vie de l’entreprise selon le principe 1 personne = 1 voix, quelle que soit la part de capital détenue. Les bénéfices de l’entreprise permettront de constituer des réserves dédiées à l’entreprise. Les réserves sont impartageables et renforcent l’assise financière de l’entreprise, et donc sa pérennité. (distribution aux salariés sous forme de dividendes)
Croc La Vie sera une coopérative ancrée sur son territoire. Les parties prenantes de la gouvernance seront diverses et locales : salariés, entreprises, producteurs, usagers, mais aussi collectivités publiques, associations, bénévoles, particuliers… Le challenge consiste à faire converger autour d’un projet de développement territorial des acteurs aux intérêts initiaux divergents. La coopérative contribuera, par exemple, à la structuration de la filière bio locale.
L’approvisionnement en circuit court permet un approvisionnement en produits frais, locaux, parfois bio et une réelle plue-value pour les habitants et le territoire :
Pour répondre au triple enjeu du maintien d’une agriculture de proximité et respectueuse des ressources, du maintien de l’emploi local et enfin d’une demande qualitative de la part des consommateurs, des initiatives de production/distribution en circuit court se mettent en place.
Il semble aujourd’hui que le raccourcissement de la chaîne du producteur au consommateur et la réappropriation collective du système alimentaire offrent l’opportunité de répondre aux dysfonctionnements du système.
On assiste à des modes de consommation hybrides, où l’enjeu n’est pas forcément de renoncer aux canaux d’approvisionnement agro-industriel mais de pouvoir enclencher un choix sur ses sources d’approvisionnement.
Circuits courts : les agriculteurs ne subissent pas les prix, ils sont partie prenante de la décision sur le prix attribué aux produits, la nécessité de garantir une chaîne équitable.
La construction de nouvelles relations économiques entre consommateurs et producteurs, tout en rendant les produits de qualité accessibles à la population, doit garantir des revenus décents aux producteurs. Il n’est pas imaginable de créer un sous prolétariat agricole. Il faut un modèle équitable.
Il s’agit d’encourager un modèle économique équilibré qui permette aux producteurs de vivre de leur activité productive, fortement créatrice de valeur d’intérêt social. En effet, il s’agit plus largement de réhabiliter le travail de la terre, qui aujourd’hui profite souvent bien plus aux intermédiaires qu’aux producteurs. La commande publique, sous forme de marché réservé, est un levier intéressant qui permettrait ce nouveau modèle économique, décent pour les producteurs, accessible pour les consommateurs et respectueux des enjeux collectifs de relocalisation de l’économie et de préservation des ressources naturelles.
Vivre de sa production, construire un nouveau modèle économique local devrait aussi induire une dimension plus large que l’activité productive en elle-même, la dimension coopérative, avec les consommateurs, mais aussi entre producteurs. La solidarité, la dimension collégiale permettent des conditions de travail moins difficiles pour les producteurs que s’ils restent isolés. C’est en se regroupant que les producteurs seront certainement le mieux à même d’accéder à de bonnes conditions de vie. De même, en étant solidaires et coopératifs, les producteurs pourront indéniablement mieux négocier la commande publique, y répondre de façon cohérente et techniquement viable sur les territoires, à l’heure où, seuls, ils ne peuvent faire face aux grosses centrales d’achat.
Nous demandons une forte implication politique pour que le pays se donne les moyens d’une autre manière de se nourrir, de redonner de la valeur à l’acte de se nourrir, une valeur qui se situe aussi hors du champ marchand et monétaire.
Manger, ce n’est pas seulement ingérer les éléments chimiques dont l’organisme a besoin, c’est aussi créer du lien social et du plaisir. Ces deux aspects sont fondamentaux dans toute action liée à l’alimentation.
Une alimentation doit contenir du sens (« je suis ce que je mange ») et pour cela, elle doit avoir un lien fort avec le territoire. En effet, la tendance à l’étiolement du lien avec l’alimentation s’explique par une succession de phénomènes divers (étalement urbain, abandon de cultures vivrières au profit des agro carburants etc…) et, d’une façon générale, par la distance de plus en plus grande qui sépare le producteur du consommateur.
Assurer une meilleure accessibilité à l’alimentation de qualité, c’est promouvoir et développer l’offre de produits locaux.
Affirmer vouloir de nouveau lier alimentation et territoire, c’est défendre le développement des territoires et la protection de leurs ressources naturelles.
Les élus locaux sont interpellés au premier chef sur l’alimentation des citoyens de leur territoire.
Il est nécessaire d’avoir l’ambition de redonner à tous les citoyens les moyens de se nourrir quantitativement et qualitativement. Cela implique notamment de favoriser l’autoproduction et de développer les jardins partagés, de manière à ce que les citoyens aient la possibilité de prendre en main leur alimentation, même s’ils résident en habitat collectif urbain.
Membres du groupe de travail :
Apes ; Cigales ; E2i ; Mutualité Française ; Terre de Liens ; Apreva ; Centre Social centre ville de Villeneuve d’Ascq ; Le Pas de Côté ; SEL ; Gabnor ; Scic A La Marge ; l’Union fait la ferme ; Macif ; Unsa
Comité de pilotage : APES, CRESS, RTES (animateurs de la mobilisation régionale) ;
AROFESEP, Artois Comm, Cap Solidarités, CFDT, Conseil Général 59, CFE-CGC, CGT, Chantier Ecole, Cigales, Conseil Régional, COORACE, CPCA, FO59, GABNOR, GEMA, Ville de Lille, Lille Métropole Communauté Urbaine, MRES, Mutualité Française, URIAE, URIOPSS, URSCOP, USGERES
Contributeurs :
Associations Accueil Paysan, Artisans du monde, A Petits Pas, Arcade, Down Up, les Paniers de la Mer, Collectif de l’Envie au Projet, La Chambre d’Eau, la Fabrique à Rêves
Pays Coeur de Flandres, Communauté de Communes Artois Lys, Lilas Autopartage, Région Nord-pas-de-Calais, Croc la Vie, bénévoles, étudiants
Il est crucial désormais de s’impliquer, de prendre la place dans les lieux de décision, de s’organiser de manière collective dans les lieux de débat et les instances de concertation.
Les élus peuvent avoir un impact significatif sur leur territoire, prendre la décision de mettre en place des cantines bio peut amener à requalifier une zone d’activité en zone agricole, à protéger les zones agricoles existantes, à racheter du foncier, ils peuvent mener une réflexion sur la rémunération des services environnementaux au territoire effectués par les producteurs bio, rémunération par la collectivité au vu de la préservation de l’environnement fait par ces producteurs. …
Agir sur l’alimentation de la population locale implique une vision globale : qui produit, comment, où, à quel coût, combien d’emplois sont créés, quel changement sur l’environnement …
Il existe une diversité d’élus qui agissent, des chaînes d’acteurs qui doivent pouvoir coordonner leurs actions : les services d’urbanisme, de santé, d’alimentation …
La question de la transversalité est cruciale car agir sur l’alimentation ne doit pas s’opposer à une politique de logement par exemple …
Il faut le courage d’une vision à long terme : aujourd’hui la mise en place d’une politique agricole de conversion en bio est incompatible avec le fonctionnement des appels d’offres en termes de durée. Passer en bio représente un investissement important, les agriculteurs ont besoin de savoir quels aides ils peuvent obtenir sur une durée qui correspond au temps que nécessite la terre pour être en bio. Aujourd’hui les appels d’offre sont contractualisés sur du très court terme.
Si une collectivité s’engage à passer la restauration collective en bio, des agriculteurs seront prêts à convertir au moins une partie de leur exploitation. Il faut pour cela prévoir de former les agents d’accompagnement technique. Il est important de prévoir aussi une meilleure visibilité sur les aides financières potentielles, via l’Europe par exemple.
Une politique transversale, c’est notamment rendre compatibles une alimentation de proximité et une politique de logement accessible :
10 millions de personnes habitent en zones périurbaines, 10 fois moins denses que les centres-ville. Les conséquences sont le mitage des espaces naturels, le grignotage des terres agricoles, les atteintes à la biodiversité en sus des difficultés techniques comme le raccordement aux différents réseaux (eau, électricité …). Pour maîtriser ces dérives, il faudrait imposer , en particulier dans les plans locaux d’urbanisme, une densité minimale dans les zones proches des transports en commun. Encore une fois la dispersion des responsabilités ne permet pas toujours des politiques cohérentes à l’échelle d’une agglomération. Une régulation équitable du droit de l’usage des sols, capable de garantir une ville compacte et accessible même aux ménages modestes, passe en premier lieu par la maîtrise du foncier.
Proposition sur les produits alimentaires : intégrer les coût indirects au prix de vente, le prix d’un produit bio fabriqué localement serait de ce fait moins cher qu’un produit de la grosse industrie fabriqué en Espagne. Ca redevient logique.
Impliquer la société civile dans le système de production en tant que consommateur, épargnant : par exemple, en rétablissant un collège de consommateurs à la chambre d’agriculture, en mettant en place des instances de dialogue réunissant l’ensemble du monde agricole, des élu(e)s touchant à différents domaines, des consommateurs, des citoyens.
Penser l’alimentation comme acte éducatif à part entière, renforcer notamment l’accès des populations fragilisées à la restauration scolaire.
Les choix de consommation que nous faisons ont un impact sur la vie locale, l’environnement, les emplois créés, la santé de tous, …
Réfléchir à ce que nous achetons et mangeons, faire des choix éclairés ce n’est pas une idéologie, c’est reprendre le pouvoir, décider ce qui est le mieux pour soi, pour sa famille, pour sa région etc … Il existe différents niveaux d’implication, chacun peut agir à son niveau même avec très peu de temps et de moyens.
C’est aller de l’avant ensemble : permettre à un agriculteur de recréer une exploitation près de sa ville, à un producteur de vivre de son métier, à des familles d’accéder à une alimentation saine, à un coût juste pour tous, c’est permettre de rendre compatibles le fait de nourrir une population et de préserver l’environnement, c’est exiger ensemble une qualité de vie meilleure, à un coût raisonnable.
Education du consommateur, mettre en avant alternatives comme Biocoop qui ont une charte d’engagements pointue.
Travailler avec les enfants comme levier de sensibilisation.
1. Accessibilité des bio-cabas au centre social de Villeneuve d’Ascq (59) :
Le GABNOR porte le projet des biocabas à tarif réduit, financé par le Conseil Général du Nord. L’objectif est de rendre la bio accessible à tous. Des biocabas (système de paniers géré par Norabio) sont proposés à moitié prix dans des structures partenaires : centres sociaux et associations locales, qui font le relais auprès de personnes touchant des aides sociales.
Le public concerné est peu habitué à avoir une consommation variée et équilibrée (pour des raisons économiques et culturelles). Un travail de fond sur l’équilibre alimentaire de base est donc nécessaire avant de pouvoir sensibiliser à la bio à proprement parler. Cela nécessite des animateurs motivés, qui portent le projet. L’idée est de faire prendre conscience de l’importance de l’équilibre alimentaire sur la santé, tout autant que de protéger l’environnement pour les générations futures. La bio est un thème qui s’inscrit dans une dynamique environnementale globale, qui peut être abordée sous plusieurs angles et être liée à de nombreux autres sujets. L’approche de la santé par l’alimentation est un autre axe fort. C’est une des clés d’entrée vers une démarche de sensibilisation environnementale. Mais cela n’est possible qu’en allant au-delà des représentations des individus autour de la bio vue comme une consommation réservée à des catégories sociales aisées
Une animation forte autour du dispositif, pour permettre une accessibilité culturelle, est nécessaire.
Voici un exemple de ce type d’animation dans les centre social de Villeneuve d’Ascq : une réflexion globale est menée sur la consommation par l’animatrice de l’Ecole de consommateurs. Dans ce cadre, des bio cabas à tarif réduit sont proposés aux familles. Pour accompagner cette démarche, une fois par mois, les familles (parents et enfants) cuisinent ensemble le contenu des deux biocabas dans les cuisines du centre et partagent ensuite le repas. Cela permet aux familles de s’approprier des recettes, d’accommoder les produits du biocabas, de découvrir de nouvelles saveurs, de partager un moment convivial entre les familles du centre. Il s’agit bien là d’accessibilité culturelle.
La mobilisation des familles autour de ces rendez-vous est primordiale. Cela implique une animation du dispositif très importante. C’est une des clefs essentielles de réussite.
En résumé, les adhérents du centre social ont accès aux paniers grâce au ticket modérateur, financé à 50% par le Conseil Général et à 50% par l’usager. L’usager a aussi accès à des ateliers de cuisine et autres actions de prévention. Le centre social a édité un livre de cuisine.
C’est une association d’insertion, SCI, qui assemblent et distribuent les paniers.
Les acteurs sont l’équipe et les usagers du centre social ; le Conseil Général qui finance à 50 % ; les autres centres sociaux de Villeneuve d’Ascq ; les producteurs fermiers ; l’entreprise d’insertion qui distriubue les paniers
Depuis 1 an, une trentaine de familles se sont montées en groupement d’achat. Ce groupement va être ouvert aux usagers des autres centres sociaux de la ville. Suivant cet exemple, le centre social Cocteau lance un groupement d’achat sur les produits d’entretien qui sera aussi ouvert.
plus d’infos : www.apes-npdc.org : Etude sur les Circuits Alimentaires Coopératifs et Consommateurs » (octobre 2010)
2. L’entreprise de restauration collective Croc la Vie (Lille, 59)
L’alimentation Bio accessible aux moins de 3 ans dans le cadre de l’Economie Solidaire ? C’est le défi que s’est lancé Anthony Beharelle, fondateur de la société Croc La Vie. Fort des constats qu’il existe une réelle insatisfaction des crèches à propos de l’offre en restauration collective sur la Métropole Lilloise, que les structures d’accueil se développent rapidement et que le marché du bio augmente de 10% chaque année, cet entrepreneur détecte un réel potentiel de marché, qui correspond à ses valeurs.
Il crée donc la société Croc La Vie en 2009, basée à la ruche d’entreprise d’Hellemmes, qui produit et livre les crèches en repas bio adaptés aux spécificités de la nutrition des enfants de 0 à 3 ans.
Ce jeune entrepreneur de l’économie de demain ne tarde pas à se faire remarquer et devient Lauréat 2010 de Nord Entreprendre et Lauréat LMI. Il reçoit aussi le Grand Prix « Coup de Cœur » 2010 de la Finance Solidaire décerné par Le Monde et Finansol. Ces récompenses gagent de son innovation et de son futur succès.
Croc La Vie a été créée avec la vocation d’améliorer les comportements alimentaires et de les recentrer autour du plaisir, du partage et de la santé. La fabrication et la livraison de repas bio aux structures d’accueil de la petite enfance est l’activité principale. Cependant, à l’image de son créateur, les valeurs de cette société sont très fortes. Ainsi Croc la Vie s’engage à préserver l’environnement, à promouvoir le développement bio local, à être acteur de l’économie sociale et solidaire et à exceller dans la qualité des ses aliments et de son service.
Croc La Vie, qui est passé de 190 repas à 280 repas/jour en seulement quelques mois d’activité, a pour objectif d’approvisionner 40 crèches d’ici 3 ans, ainsi que de créer 8 nouveaux emplois et de passer au statut de SCIC.
3. Le Panier de la Mer ( Boulogne, 62)
L’Association le « Panier de la mer » à Boulogne (62) créée en 2002, conjugue 3 vocations : valorisation de la ressource de la pêche, insertion sociale et action caritative. Le Panier de la Mer 62 est adhérent d’une Fédération Nationale, propriétaire du label et garant de sa charte éthique.
Militante de l’économie solidaire, la fondatrice Brigitte Bourguignon, actuellement présidente, recherchait une alternative à la destruction des produits invendus en criée, et c’est lors d’une remise de prix dans l’action solidaire qu’elle a connu Emile Gueguen, père fondateur du concept Panier de la mer au Guilvinec en 1998.
De par une riche collaboration, il a pu être établi sur Boulogne les conventions de coopération nécessaires au traitement de ces produits. Notamment entre les Organismes producteurs (le FROM-Nord et le la Coopérative Maritime Etaploise) « propriétaires » de la matière première le poisson, les structures caritatives « destinataires » des produits transformés et OFIMER l’organisme de contrôle désigné par l’Europe qui veille à ce que le poisson mis en retrait et donc compensé financièrement aux pêcheurs par des fonds européens et nationaux ne réintègre en aucune façon le système marchand. Ces obligations définies dans la législation européenne autorisent la récupération de ces produits à l’unique condition que les produits issus de leur transformation soient redonnés moyennant une contribution solidaire de 2€/kg pour les frais de conditionnement, à des structures caritatives définies précisément par cette même règlementation.
Les trois vocations de la structure :
Une logique Environnementale : Au quotidien l’association Panier de la Mer 62 valorise une ressource destinée initialement à la destruction (farine animale entre autre), au sein de son atelier-école en réalisant l’étêtage, l’éviscération, l’écorchage, le filetage éventuel, le conditionnement et la livraison des produits auprès des structures caritatives conventionnées.
En 2010, les salariés du Panier de la mer (20 personnes) ont travaillé 120 tonnes de poisson soit 56 tonnes de produits transformés livrés.
Une logique Insertion Sociale: L’association propose à ses 20 salariés un contrat de travail de 26h semaine, d’une durée de 6 mois renouvelable. Essentiellement bénéficiaires du RSA et acteurs de leur parcours d’insertion, ces personnes hommes, femmes âgés de 26 à 55 ans peuvent également bénéficier en complément des leur activité à l’atelier, d’une formation plus spécifique à leur projet professionnel (bâtiment, mécanique auto, coiffure..). L’objectif de l’association n’étant pas de former des fileteurs mais bien de leur permettre, le temps du contrat de participer à la vie économique, de retrouver une place dans la société, un statut, une dignité et de s’investir dans leur avenir professionnel guidé, accompagné et soutenu par l’association.
A la fin de leur contrat, 30% des salariés retournent vers l’emploi (CDI, CDD de + de 6 mois, intérim longue durée, formation qualifiante). Pour les autres c’est l’accompagnement social qui prévaut, la quête d’une stabilité sociale étant la première haute marche vers l’emploi.
Une logique Caritative: Le Panier de la Mer 62 lutte à sa mesure contre la malnutrition du public précaire rencontré lors des distributions alimentaires. La distribution de poisson frais permet de varier les menus des bénéficiaires de ces distributions, tout en leur apportant une source protéinée de très bonne qualité.
Seule ombre au tableau, la cuisson du poisson peut représenter un frein pour certains publics, c’est pourquoi l’association a développé depuis juillet 2007 un atelier culinaire encadré par un formateur professionnel à temps partiel. Ces ateliers ont pour vocation d’une part de former les salariés à la valorisation du produit brut en plats cuisinés mais aussi de favoriser la consommation de poisson et de légumes de part leur présentation en barquettes individuelles. Ces ateliers se sont fortement développés depuis ces deux dernières années grâce à des financements CUCS et DRAFF. Il y a actuellement 180 ateliers programmés sur 2011 sur 8 structures (maisons de quartiers, centres sociaux, centres de distribution alimentaire).
En parallèle avec ses ateliers développés au niveau des structures, des ateliers de formation culinaire ont également été mis en place pour que les salariés puissent être formés à la valorisation du poisson. Des prestations traiteur (buffet, cocktail dînatoire, lunch, plateau repas) sont également proposées qui permettent au delà de l’aspect financier d’offrir aux salariés la possibilité de valoriser les compétences auprès d’un plus large public.
Mise à part la contribution solidaire, il y a la nécessité de développer des activités annexes pour développer l’autofinancement dont la vente d’une soupe de poisson qui porte les couleurs de l’association et qui représente l’association dans de nombreux points de vente de la région.
Plus d’infos : www.federationplm.blogspot.com
Il existe dans notre pays un problème d’accessibilité à l’alimentation saine et de qualité , les freins sont à la fois financiers (coût des produits, paupérisation de la population), quantitatifs (offre insuffisante au niveau de la production de proximité, le bio dans la restauration collective) et culturels (culture des produits et de la manière de les préparer).
Notre région paie un lourd tribut en termes de santé publique, d’environnement…
Parole à Christine Janicki du Centre social centre-ville de Villeneuve d’Ascq (59)
« La consommation en produits bio, issue des circuits courts de proximité, n’est pas réservée aux plus solvables. En effet, même si elles cumulent les difficultés socio-économiques, les familles des quartiers sont aussi préoccupées par l’impératif de protection des ressources naturelles, mais elles n’ont pas forcèment accès aux moyens d’agir pour, ou n’en n’ont pas conscience. Un travail d’animation est nécessaire pour chacun puisse trouver sa place dans ces démarches. Mais une fois que les familles s’y engagent, on constate des changements dans leur alimentation qui sont à l’avantage de leur situation socio-économique : les individus achètent des quantités moindres et jettent moins. En effet, les bas prix et les offres promotionnelles pratiqués par la grande distribution poussent souvent à acheter des quantités plus importantes que ce dont on a réellement besoin et à en perdre, jeter une grande partie. »